peine

3e édition

PEINE.

s. f.
■  Douleur, affliction, souffrance, sentiment de quelque mal dans le corps, ou dans l’esprit. Les peines du corps. Les peines de l’esprit. Les peines de l’esprit sont d’ordinaire plus grandes que celles du corps. Il a des peines d’esprit insupportables.
On appelle, La peine du sens, Les douleurs que les damnez souffrent par les tourmens de l’enfer : Et, La peine du dam, Ce que la privation de la vûe de Dieu leur fait souffrir.
On appelle aussi, Peines du purgatoire, Ce que les ames souffrent dans le Purgatoire, soit par les tourmens, soit par la privation où elles sont alors de la vûe de Dieu.
Peine, Signifie aussi Châtiment, punition d’un crime. Il a commis la faute, il en portera la peine. Cet éxil, cette disgrace est la peine de son crime. On lui a ordonné cela sur peine, sous peine, à peine de la vie. On dit dans ce sens, La peine du talion, la peine du quadruple.
Peine, Signifie aussi, Travail, fatigue. Il n’a pas fait cela sans peine. Sa peine n’a pas été inutile. Sa peine n’a pas été infructueuse. Il est mal-aisé de faire quelque chose de beau sans peine. Il a un esprit facile, aisé, qui fait tout sans peine. Je ferai cela, ou je mourrai à la peine.
On dit, d’Un homme qui a travaillé inutilement à quelque chose, qu’Il y a perdu sa peine, ses peines.
On dit prov. Nul bien sans peine ; Et dans p. 301le même sens on dit, qu’Il y a certaines entreprises où la peine passe le plaisir.
Peine, Se dit aussi, Des difficultez, des obstacles que l’on trouve dans une entreprise. Il aura beaucoup de peine à gagner ce procès-là. Il a eu beaucoup de peine à faire sa fortune, à venir à bout d’une telle chose. Et dans cette acception on dit, d’Un homme qui a de la difficulté à parler par quelque empêchement naturel, qu’Il a de la peine à parler.
On dit aussi dans le même sens, qu’Un homme a de la peine à marcher, Quand il se sert difficilement de ses jambes.
On dit par politesse, Prenez la peine de faire cela ; Il a pris la peine de me venir voir, pour dire, Je vous prie de faire cela ; Il m’est venu voir.
On dit dans le discours fam. La chose en vaut bien la peine, pour dire, que La chose dont il s’agit est d’assez grande considération, assez importante, pour mériter qu’on ne néglige rien afin d’y réussir. Si vous voulez obtenir cette grace, il faut faire agir tous vos amis ; la chose en vaut bien la peine. Et l’on dit dans le sens contraire, Cela n’en vaut pas la peine, ce n’est pas la peine. Voulez-vous que je vous aille trouver pour cela ? non, cela n’en vaut pas la peine. Ce n’est pas la peine d’attendre si long-temps pour si peu de chose.
On dit encore dans le discours familier, Ce n’est pas la peine d’en parler : Et cela se dit par ironie, pour éxagérer davantage la chose dont il s’agit, en faisant semblant de la diminuer. Il ne lui a volé que cent mille écus, ce n’est pas la peine d’en parler, cela ne vaut pas la peine d’en parler.
Peine, Se dit pareillement, De la répugnance d’esprit qu’on a, à dire ou à faire quelque chose. J’ai de la peine, j’ai peine à lui annoncer une si méchante nouvelle. Et on dit, que L’on fait une chose sans peine, pour dire, que C’est de bon cœur, sans nulle contrainte.
Peine, Se prend aussi pour le salaire du travail d’un artisan. Il ne faut pas retenir la peine du mercenaire, la peine d’un pauvre homme. Et on dit, Donner à quelqu’un pour sa peine, pour ses peines ; Payer à quelqu’un sa peine, le payer de sa peine, de ses peines, pour dire, Lui donner quelque chose en récompense de ce qu’il a fait, du service qu’il a rendu.
Peine, Se prend aussi quelquefois, pour Inquiétude d’esprit. J’étois fort en peine de ce qu’il étoit devenu. Vous m’avez tiré de peine. On m’a mis hors de peine. Me voilà hors de peine. On est extrêmement en peine de lui. On est en peine de ses nouvelles. Je suis en peine de n’avoir point de ses nouvelles. Je suis en peine de savoir ce qu’il deviendra. Les dernières nouvelles que j’ai reçûes me mettent fort en peine. Tout le monde est en peine de savoir à quoi cela aboutira.
On dit encore, qu’Un homme est en peine, qu’il est dans la peine, pour dire, qu’Il a des embarras d’affaires, qu’il a des affaires fâcheuses qui l’embarrassent.
A peine. adv. Il a différentes significations, selon les différentes façons de parler avec lesquelles on le joint. On s’en sert quelquefois pour marquer qu’une chose suit de si près une autre, qu’elles sont presque en même temps toutes deux ; & alors il se rend par Dès que, aussi-tôt que. Ainsi on dit, A peine le Soleil étoit-il levé, qu’on apperçut l’ennemi. A peine fut-il entré, qu’il s’en alla. A peine serons-nous arrivez, qu’il faudra partir, pour dire, Dès que le Soleil fut levé ; Dès qu’il fut entré ; Dès que nous serons arrivez.
On s’en sert aussi, pour marquer le peu de temps qu’il y a qu’une chose dont on parle est arrivée. Ainsi on dit, A peine est-il hors du lit. A peine sommes-nous entrez, pour dire, Il ne fait que de sortir du lit ; Il n’y a qu’un moment que nous sommes entrez.
On s’en sert encore dans la signification de Presque pas. Et dans ce sens on dit, A peine voit-on à se conduire. A peine est-il jour. A peine a-t-il le nécessaire. A peine sçait-il lire, pour dire, Il n’est presque pas encore jour ; On ne voit presque pas à se conduire ; Il n’a presque pas le nécessaire ; Il ne sait presque pas lire. Vous dites que cet homme est avare, à peine garde-t-il quelque chose pour le lendemain.
On dit, A grand’peine, pour dire, Mal-aisément, difficilement. Si vous n’avez pû faire une chose si aisée, à grand’peine en ferez-vous une plus difficile.
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