prendre

PRENDRE

conjugaison verbe transitif, intransitif et pronominal Conjugaison : (se conjugue comme Apprendre).
Étymologie : ixe siècle. Issu du latin prendere, contraction de prehendere, « saisir, prendre ».

I.

I. Verbe transitif.
A.  Saisir, emporter, emmener.
1.  Saisir avec la main quelque chose dont on veut faire usage, le tenir. Prendre une canne. Il prit son violon et commença à jouer. Prendre un livre sur l’étagère. Prendre des pièces dans son porte-monnaie. Il lui a pris le couteau des mains. Prendre des cerises à pleines mains. Prendre quelque chose entre ses doigts, du bout des doigts. Vous avez pris le plan à l’envers.
▪  Se dit aussi des parties du corps et, par métonymie, d’un être vivant. Il lui prit le bras pour l’aider à traverser. Prendre sa tête dans ses mains. Prendre quelqu’un à la gorge. Il l’a pris par l’oreille, par la main. Prendre un chiot par la peau du cou, un cheval par la bride.
▪  Loc. et expr. fig. Prendre ses jambes à son cou, s’enfuir à toute vitesse. Prendre la clef des champs, la poudre d’escampette (fam.), fuir. Prendre les armes, se soulever contre quelqu’un, quelque chose, entrer en guerre. Prendre la balle au bond, profiter sans délai d’une occasion favorable. Prendre la plume, se mettre à écrire. Prendre sa lyre, son luth (litt.), composer des vers. Prendre les rênes d’un parti, d’une entreprise, s’attribuer ou se voir attribuer sa direction. Prendre une affaire en main, en assurer la conduite. Prendre en main les intérêts de quelqu’un. Prendre son destin en main. Se prendre en main, se donner une ligne de conduite. Se prendre par la main, se forcer à affronter une situation, se décider à faire ce que l’on redoute. Fam. Prendre son courage à deux mains, faire un effort sur soi-même pour accomplir un acte difficile, pénible, après beaucoup d’hésitations, d’appréhensions. Prendre le volant, se mettre à conduire. Il n’a eu qu’à se baisser pour prendre, se dit d’une personne qui a recueilli sans effort un profit, un avantage. Se prendre aux cheveux (pron. à valeur réciproque), se disputer vivement, se battre, se quereller. Elles se sont prises aux cheveux pour une histoire d’héritage. Prendre le taureau par les cornes, affronter résolument une difficulté. Prendre le mal à la racine, s’attaquer à sa cause première.
2.  Saisir avec une partie du corps autre que la main, ou au moyen d’un outil, d’un ustensile. Prendre quelqu’un dans ses bras. Prendre des braises sur une pelle. Prendre du foin avec une fourche, de l’eau avec un seau.
▪  Expr. Prendre quelqu’un à bras-le-corps, le saisir avec vigueur et, fig., prendre à bras-le-corps une tâche, une difficulté, s’attacher avec énergie à en venir à bout. Prendre le mors aux dents, s’emballer, en parlant d’un cheval, et, fig., se laisser emporter par son impétuosité. Fig. Ne pas être à prendre avec des pincettes, être d’une saleté repoussante (vieilli) et, par extension, être d’une humeur exécrable. Prendre une nouvelle avec des pincettes, avec prudence, avec précaution. Fam. Vouloir prendre la lune avec les dents, rêver d’une chose impossible.
3.  Emporter ou apporter avec soi ; se munir de. Pensez à prendre vos papiers, à prendre la carte de la région. Ne prenez que l’indispensable. Il est interdit de prendre du bois dans cette forêt. Pourras-tu prendre le pain, les journaux en chemin ? Prendre de l’essence, en emplir le réservoir de son véhicule.
▪  Loc. fig. Prendre quelque chose sur soi, en revendiquer toute la responsabilité. Il a pris sur lui la faute. J’ai pris sur moi de lui dire la vérité. Prendre quelque chose en charge, à sa charge, en assumer la responsabilité.
▪  Spécialement. En parlant d’un vêtement. Le mettre sur soi, s’en vêtir. Vous grelottez : prenez mon manteau. Loc. et expr. Prendre le deuil, se vêtir de noir à l’occasion de la mort d’un proche et, fig., prendre le deuil de quelqu’un, de quelque chose, manifester le regret d’une personne disparue, d’une chose qui n’est plus. Prendre l’habit, le voile, entrer en religion. Prendre du galon (fam.), être promu à un grade supérieur et, par extension, obtenir de l’avancement. Fig. et fam. Prendre des gants, user de précautions pour éviter de blesser autrui. Il n’a pas pris de gants pour lui annoncer la nouvelle. Prendre ses cliques et ses claques, s’en aller brusquement en emportant, ou non, ses affaires.
4.  Emmener une personne ou un animal avec soi. Le capitaine prit trente hommes avec lui pour effectuer une reconnaissance. Tous les dimanches, il prend son chien pour aller en forêt. Prendre quelqu’un en croupe, sur sa motocyclette. Le taxi a refusé de les prendre. Spécialement. Aller chercher quelqu’un. Je vous prendrai en passant, je passerai vous prendre à deux heures. Fig. La mort l’a pris dans son sommeil.
▪  Expr. Prendre quelqu’un à part, à l’écart, s’éloigner avec lui pour lui parler en aparté. Par extension. Accueillir chez soi, s’occuper de. J’ai pris ses enfants quelques jours à la maison. Prendre quelqu’un en pension. Expr. fig. Prendre une personne sous sa protection, sous sa garde, sous son aile, la protéger, lui prodiguer son aide, ses conseils.
5.  Fig. Aborder quelqu’un, appréhender quelque chose de telle ou telle façon. Prendre quelqu’un à rebrousse-poil. Elle l’a pris par les sentiments, par la douceur.
▪  Prendre le problème à l’envers, dans le mauvais sens, à rebours. Ce terme doit être pris dans son sens figuré, au sens figuré. Prendre la vie du bon côté. Prendre bien, mal une remarque. Prendre les choses comme elles viennent, en philosophe. Prendre un avertissement à la légère, au sérieux. Prendre l’allusion pour soi.
▪  Loc. et expr. Savoir prendre quelqu’un, savoir s’attirer sa faveur, le gagner à ses vues. On ne sait par où le prendre, par quel bout le prendre, se dit d’une personne que tout irrite, ou d’un problème difficile à traiter. Prendre la chose de plus haut, remonter aux évènements qui précèdent, aux circonstances qui l’ont amenée. Le prendre de haut ou, vieilli, le prendre haut, bien haut, répondre, réagir avec arrogance ; traiter avec dédain. Prendre une expression au pied de la lettre, à la lettre, au sens strict. À tout prendre, tout bien considéré, somme toute. Prendre quelque chose à cœur, y apporter du zèle ou s’en trouver touché. Il a pris vos critiques très à cœur. Prendre quelque chose en bonne, en mauvaise part, l’interpréter en bien ou en mal. Ce mot se prend tantôt en bonne, tantôt en mauvaise part, il s’emploie de manière tantôt laudative, tantôt péjorative. Prendre quelqu’un en amitié, en pitié, être gagné par ce sentiment à son égard. Il a pris le nouveau venu en grippe. Prendre quelque chose en considération, en tenir compte pour une décision. Prendre son mal en patience, l’endurer.
▪  Spécialement. Avec un attribut du complément d’objet direct introduit par pour. Considérer, traiter comme ; confondre avec. Pour qui me prenez-vous ? Prendre un homme pour une dupe, pour un idiot. Se prendre pour un génie, pour un héros. De loin, je vous ai pris pour votre frère. Expr. Se prendre pour le centre du monde ou, fam., pour le nombril du monde, faire montre d’égocentrisme. Ne pas se prendre pour n’importe qui (fam.), concevoir un orgueil exagéré de sa personne, de ses fonctions, de ses pouvoirs. Prendre pour argent comptant, accepter avec naïveté, sans esprit critique. Prendre ses désirs pour des réalités. Fam. Prendre la maison de quelqu’un pour un hôtel, manquer d’égards vis-à-vis de son hôte. Prendre des vessies pour des lanternes, se méprendre grossièrement.
B.  Se rendre maître de quelqu’un, de quelque chose, par force ou par ruse.
1.  S’emparer de quelqu’un, l’arrêter. Les gendarmes ont pris deux des agresseurs. Il s’est fait prendre en passant la frontière. Les terroristes ont pris cinquante otages. Expr. proverbiales. Sitôt pris, sitôt pendu, se dit lorsque la punition suit immédiatement la faute. Pas vu, pas pris (fam.), les fautes commises en cachette restent souvent impunies.
▪  Par analogie. Réduire à l’immobilité ; retenir. Surtout au passif. Ils ont été pris dans les sables mouvants. Être pris dans les embouteillages. Le port est pris par les glaces, est gelé. Expr. fig. Être pris dans un étau, être pris en tenailles, être pressé de toute part, ne trouver aucune échappatoire. Être pris dans un engrenage, dans l’engrenage, être entraîné dans un enchaînement de circonstances dont on ne peut se libérer. Être pris entre deux feux, entre deux adversaires, deux partis, deux dangers également menaçants.
▪  Par extension. Surprendre quelqu’un. Dans des locutions et expressions. Prendre quelqu’un au saut du lit, au réveil. Prendre quelqu’un au dépourvu ou, fam., à froid, à un moment où il n’était pas préparé. Votre question me prend au dépourvu. Prendre quelqu’un de court, ne pas lui laisser le temps de réagir. J’ai été pris de court et n’ai su que répondre. Prendre quelqu’un de vitesse, atteindre un lieu, un objectif avant lui. Prendre quelqu’un au mot, interpréter ses propos de manière littérale, ou l’obliger à se conformer à ses paroles. Spécialement. Saisir, surprendre quelqu’un au moment où il commet une faute. Cet élève a été pris en train de tricher. Dans « Les Confessions », Rousseau est pris par son maître à voler une pomme. On vous y prend, je vous y prends ! Loc. Prendre quelqu’un en faute, en défaut. Prendre quelqu’un sur le fait, en flagrant délit, le surprendre au moment où il agit. Prendre quelqu’un la main dans le sac, en train de dérober de l’argent et, fig., au moment où il commet un forfait.
2.  Attraper, capturer un animal, en particulier à la chasse ou à la pêche. Prendre un cheval au lasso. Prendre des oiseaux à la pipée. Prendre un renard au piège. Nous avons pêché tout le jour sans rien prendre.
▪  Expr. fig. Prendre quelqu’un au piège ou, vieilli, au trébuchet, le duper, le berner. Prendre quelqu’un dans ses filets, dans ses rets, le tromper ou le séduire par des artifices. Se laisser prendre à des paroles, à des promesses, se laisser abuser par elles.
▪  Prov. On ne prend pas les mouches avec du vinaigre, on réussit, on persuade moins par l’aigreur que par la douceur. Tel est pris qui croyait prendre, par allusion à la fable de La Fontaine « Le Rat et l’Huître », se dit quand le dupeur est dupé.
3.  Soumettre, conquérir. Prendre une forteresse, une place forte. La capitale a été prise. Prendre un navire à l’abordage. Spécialement. Prendre une femme, la posséder. Prendre une femme de force, la violer.
▪  Loc. Prendre le pouvoir, arriver à la tête d’un État, d’une organisation, etc., le plus souvent en usant de la force. Prendre le contrôle de quelque chose, s’en rendre maître par la force ou par diverses manœuvres. L’armée a pris le contrôle de cette zone. Prendre le pas sur quelqu’un, sur quelque chose, l’emporter sur lui. Le bon sens a finalement pris le pas sur sa colère.
▪  Fig. La fièvre l’a pris dans la soirée. Une odeur qui vous prend à la gorge, au nez ou, elliptiquement, qui prend à la gorge, au nez, dont l’âcreté, la force saisit. Être pris de vomissements. La fureur l’a pris. Il fut soudain pris d’un accès de panique, d’une crise de fou rire. Fam. Qu’est-ce qui l’a pris ? Cela le prend-il souvent ? se dit à propos d’une personne dont le comportement paraît surprenant, extravagant.
▪  Par affaiblissement. Accaparer, occuper tout entier. Surtout au passif. Être pris par un travail, une activité.
4.  S’approprier ce qui appartient à autrui, dérober. On lui a pris sa bourse, sa montre, tout ce qu’il possédait. Ils lui ont pris jusqu’à son dernier sou. Expr. fam. C’est autant de pris, c’est toujours cela de pris, se dit d’un petit avantage dont on profite sur-le-champ dans la crainte d’en être privé.
▪  Fig. Il lui a pris sa place. Il a pris l’identité du disparu.
▪  Par extension. Tirer de. Ce quartier a pris son nom du fleuve qui le traverse. Il a pris cela dans Cicéron, dans Virgile, le lui a emprunté.
▪  Marque de domaine : jeux. Prendre la main, remporter un coup et pouvoir ainsi jouer en premier au coup suivant. Aux échecs, aux dames, etc. Prendre une pièce à son adversaire, s’en emparer et la sortir du jeu. Prendre un pion. Je prends votre cavalier avec mon fou. – Marque de domaine : marine. Prendre le vent d’un bâtiment, en parlant d’un bateau, se placer entre ce bâtiment et le point d’où le vent souffle.
C.  Se rendre acquéreur de quelque chose, se le procurer.
1.  Entrer en possession d’un bien, bénéficier d’un service moyennant paiement. Prendre un billet au guichet. Il a pris en gros toute la marchandise. Prendre une assurance. Prendre des parts dans une affaire. Prendre un commerce, s’établir dans un négoce. Expr. Cette marchandise est à prendre ou à laisser, il faut en donner le prix demandé ou renoncer à l’acquérir et, fig., c’est à prendre ou à laisser, il n’y a pas de moyen terme. Fig. Il y a à prendre et à laisser dans cette proposition, il s’y trouve du bon et du mauvais.
▪  Spécialement. S’attacher les services d’une personne moyennant rémunération ; embaucher. Prendre une cuisinière, un chauffeur. Prendre un précepteur, une gouvernante. Il a pris un apprenti, un associé.
▪  Par extension. S’engager à s’occuper d’un bien, d’une affaire, etc. selon une modalité donnée. Prendre une somme en dépôt. Prendre des terres à ferme, des marchandises à crédit. Prendre un ouvrage à la tâche (vieilli), se charger d’un travail contre une rétribution fixe et non en fonction du temps qu’il requiert. Expr. fig. Prendre à tâche de (suivi d’un verbe à l’infinitif), s’ingénier à. Il semble avoir pris à tâche de me contrarier. Marque de domaine : jeux. Dans certains jeux de cartes, s’engager à réaliser un nombre établi de points, de levées, de plis. Prendre à pique. Absolument. Il n’a pas pris une seule fois pendant notre partie de tarot.
▪  Fig. Pouvoir occuper un lieu, s’installer dans un poste, un emploi. J’ai pris une chambre dans cet hôtel. Vous prendrez vos fonctions en septembre. Par analogie. Il prendra sa retraite l’année prochaine. Marque de domaine : militaire. Prendre ses quartiers d’hiver, se disait des troupes qui, entre deux campagnes, s’installaient dans un lieu donné pour la durée de l’hiver ; fig. et fam., prendre ses quartiers d’hiver, d’été, se dit de toute personne qui passe l’hiver ou l’été dans un autre lieu que celui où elle réside habituellement.
2.  Demander, exiger, recevoir quelque chose, particulièrement une somme d’argent en échange d’un bien, d’un service, etc. Il prend quinze euros de l’heure. Prenez ceci comme acompte.
▪  Par extension. Prélever une partie d’un tout. L’agence prend 5 % de la vente, sur la vente. L’État lui prend cinquante pour cent de ses revenus. Elliptiquement. Prendre sur ses revenus, sur ses économies. Expr. fig. Prendre sa part du gâteau (fam.), réclamer, obtenir ce qu’on estime être son dû. Prendre sa part d’un travail, ne pas se dérober à la tâche. Loc. verb. Prendre part à quelque chose, y participer.
▪  Fig. Requérir, occuper. Les travaux prendront cinq à six semaines. Ce meuble prend trop de place. Elliptiquement. Prendre sur son temps, sur ses heures de sommeil, en sacrifier une partie. Prendre sur soi, se retenir, se faire violence. Pour ne pas répondre, il a pris sur lui.
▪  Marque de domaine : marine. Prendre des ris, réduire la voilure en retirant des ris au vent (on dit aussi Arriser).
3.  Recueillir ; entrer en possession de données, se les procurer. Prendre des renseignements au guichet, à l’accueil. Prendre l’avis de quelqu’un. Prendre conseil auprès d’un avocat. Prendre des nouvelles d’un proche. Prendre des informations sur quelqu’un, sur quelque chose. Fam. Où avez-vous pris qu’il briguait ce siège ? Où va-t-il prendre tout ce qu’il dit ?
▪  Spécialement. Évaluer, relever. Il a pris les dimensions de la pièce. Prendre les mesures d’une personne, prendre son tour de poitrine. Prendre la température, le pouls, la tension d’un malade. Expr. Prendre ses marques, en parlant d’un athlète, déterminer et placer les repères qui jalonnent sa course d’élan ; fig., s’habituer à un nouvel environnement. Prendre ses distances, dans une formation militaire, déterminer, en étendant un bras ou les deux bras, l’intervalle qui doit être mis entre ses compagnons de rang et soi et, fig., prendre ses distances avec quelqu’un, s’en éloigner. Fig. Prendre la juste mesure des choses, en saisir l’exacte importance.
▪  Marque de domaine : marine. Prendre la hauteur du soleil, observer à l’aide d’un instrument comme le sextant l’élévation du soleil au-dessus du niveau de l’horizon. Elliptiquement. Prendre hauteur, mesurer la distance d’un astre ou d’un objet à l’horizon. – Marque de domaine : vènerie. Prendre le vent, en parlant d’un chien, humer l’air pour repérer les odeurs de gibier apportées par le vent ; fig. et souvent péj., se déterminer adroitement en fonction des circonstances.
▪  Par extension. Enregistrer des données sur un support ; noter, consigner. Prendre des notes, un plan, un croquis. Prendre les empreintes de quelqu’un. Adressez-vous à la personne qui prend les inscriptions. Je vais prendre votre nom et votre adresse. Prendre une commande. Par analogie. Prendre des photographies. Prendre quelqu’un en photographie.
▪  Expr. fig. Prendre note, prendre bonne note de, garder en mémoire. Je prends cela à mon compte, je règlerai la dépense et, par extension, j’en assume la responsabilité. Prendre une chose en compte, lui porter l’attention qu’elle mérite.
4.  Subir, recevoir. Prendre un coup de soleil. Prendre froid. Fam. Prendre des coups, des gifles. Il a pris un coup de poing dans l’estomac. Qu’est-ce qu’il va prendre !
▪  Expr. fam. Prendre une raclée ou, pop., prendre son avoine, prendre une avoinée, se faire sévèrement corriger et, fig., être nettement battu par un adversaire, connaître une grave déconvenue. Il a pris ou, pron., il s’est pris une belle raclée. En prendre un coup, pâtir physiquement ou moralement d’un choc violent. Son orgueil en a pris un sacré coup. Fig. Prendre un coup de vieux, donner l’impression d’avoir soudainement vieilli. En prendre pour son grade, se faire vertement réprimander.
▪  Par extension. En parlant d’une chose. Prendre l’eau, laisser passer l’eau. Le bateau prend l’eau. Ces vieilles chaussures prennent l’eau. Prendre le sel, pour un aliment que l’on veut conserver, s’imprégner de sel. Marque de domaine : marine. Prendre le vent, en parlant d’une voile, être gonflée par le vent.
D.  Choisir, adopter pour un usage précis.
1.  Choisir une personne en fonction du rôle qu’on veut lui donner, une chose en fonction de l’usage qu’on veut en faire. Il a été pris dans l’équipe de rugby du lycée. Qui prendrez-vous comme avocat ? Prendre quelqu’un comme exemple, pour modèle. Prendre un métier. En devenant pape, Angelo Giuseppe Roncalli prit le nom de Jean XXIII. Elle a pris un pseudonyme pour publier ce pamphlet. Prendre la franchise comme règle, pour principe. Pour cette recette, prenez des fruits bien mûrs. Spécialement. Choisir comme exemple pour illustrer un propos, pour appuyer un argument. Prenons le cas d’un homme qui voudrait déshériter ses enfants. Vieilli. Prendre que, supposer, admettre que. Prenons qu’il n’a rien dit, que les choses se soient passées comme cela.
▪  Loc. Prendre femme, se marier. Prendre quelqu’un pour époux. Prendre quelqu’un à témoin, invoquer son témoignage, le choisir comme témoin. Prendre quelqu’un à partie, au cours d’une action en justice, attaquer une personne qui n’était pas à l’origine un adversaire et, fig., s’attaquer à quelqu’un. Prendre jour, prendre date, fixer un jour, une date. Prendre un parti, opter pour telle ou telle décision. Ne savoir quel parti prendre. Il a pris le parti de se taire. Prendre parti, dans un conflit, un débat, soutenir l’un des camps qui s’affrontent. Prendre parti contre quelqu’un. Prendre son parti de quelque chose, en prendre son parti, s’y résigner. Prendre fait et cause pour quelqu’un, dans un procès, soutenir les prétentions de l’une des parties et, par extension, se déclarer pour quelqu’un, le soutenir.
2.  Adopter de façon temporaire ou durable une posture, une attitude. Prendre une pose avantageuse. Il prit un ton sévère pour lui parler. Prendre un air hautain, des airs impertinents. Prendre de mauvaises habitudes. Zeus prit l’apparence d’un cygne pour séduire Léda.
▪  Expr. Prendre des airs, affecter des manières prétentieuses. Prendre ses aises, s’installer confortablement au risque de gêner les autres. N’en prendre qu’à son aise, ne faire que ce qui plaît, sans tenir compte d’autrui. En prendre à son aise avec quelqu’un, avec quelque chose, ne pas en faire grand cas. Prendre son pli, voir Pli I.
3.  Utiliser, emprunter un chemin, une route. Prenez ce sentier, prenez le raccourci, prenez à travers champs. Prendre la voie de terre, de mer. Prendre l’autoroute ou la nationale. Il a mal pris son virage. Ce coureur a pris la corde. Prenez la première rue à droite puis la deuxième à gauche et, elliptiquement, prenez à droite, puis à gauche.
▪  Fig. Prendre la bonne, la mauvaise voie ou le bon, le mauvais chemin, choisir le bon ou le mauvais moyen pour réussir une affaire, parvenir à ses fins. Pop. Surtout dans des phrases négatives. Cela n’en prend pas le chemin, cela ne semble pas devoir aboutir.
▪  Expr. Prendre le chemin des écoliers, choisir le chemin le plus long et, fig., flâner, musarder, à l’exemple des écoliers jamais pressés de se rendre à l’école. Marque de domaine : vènerie. Prendre les devants, se porter en avant de l’endroit où l’on a perdu la voie de l’animal chassé pour tenter de la retrouver ; par extension, partir avant quelqu’un et, fig., prévenir, devancer quelqu’un dans une affaire. En parlant des chiens. Prendre le change, se lancer sur la piste d’une autre bête que celle qu’ils poursuivaient. Prendre le contre-pied, suivre la voie de l’animal dans le sens contraire à celui où il va ; fig., prendre le contre-pied de quelqu’un, adopter le parti opposé de celui de son interlocuteur.
▪  Par extension. Emprunter comme moyen de transport. Prendre le bateau, l’avion. Il ne prend que très rarement sa voiture. Prendre le dernier métro. Expr. fig. et fam. Prendre le train en marche, s’associer tardivement à une entreprise.
4.  Faire usage de quelque chose, pour l’agrément ou les besoins personnels. Prendre trois repas par jour. Je n’ai rien pris de la journée. Prendre une tasse de thé, un café. Prendre un remède.
▪  Prendre un bain. Prendre l’air et, fam., un bol d’air, faire une brève promenade ou aller à la campagne pour profiter du grand air. Prendre le frais. Prendre le soleil. Prendre de l’exercice. Prendre du repos.
▪  Expr. fam. Prendre un verre au comptoir, à la terrasse d’un café. Inviter quelqu’un à prendre un verre. Fig. Prendre un bain de jouvence, se plonger dans un milieu, dans une atmosphère où l’on se sent rajeunir. Prendre un bain de foule, en parlant d’un personnage public, se mêler à la foule, entrer directement en contact avec elle.
▪  Par extension. Se donner, s’autoriser. Prendre son temps. Prendre du bon temps. Prenez le temps de réfléchir, prenez tout votre temps pour réfléchir. Je vous remercie d’avoir pris la peine de me recevoir. Je prends la liberté de vous écrire. Expr. Prendre des libertés avec quelqu’un, se permettre des actions ou des paroles audacieuses à son égard et, par extension, prendre des libertés avec quelque chose, ne pas le traiter avec rigueur, ne pas en respecter les principes, les règles. Ce romancier prend des libertés avec la vérité historique.
E.  Prendre marque le commencement d’une action, d’un état. Suivi d’un complément avec ou sans article, Prendre sert à former un certain nombre de locutions verbales qui sont parfois l’équivalent d’un verbe simple formé sur le radical du complément de prendre (prendre son vol et s’envoler, prendre fin et finir) ou sur un radical différent (prendre de l’âge et vieillir).
1.  Engager une nouvelle action, décider d’agir de quelque manière. Prendre la parole. Prendre contact avec quelqu’un. Prendre la suite, la relève, la succession de quelqu’un. Prendre une décision, une bonne résolution. Prendre des précautions, des risques. Je prends le pari qu’il sera en retard. Prendre possession des lieux. Prendre la défense d’un accusé.
▪  Expr. Prendre congé de quelqu’un, aller le saluer avant de partir, par déférence ou par amitié. Prendre sa revanche, regagner un avantage qu’on avait perdu ou se venger de quelqu’un ; dans un jeu, jouer une deuxième partie lorsqu’on a perdu la première. Fig. Prendre langue avec quelqu’un, engager la conversation avec quelqu’un pour s’informer, ou entrer en contact avec lui.
▪  Spécialement. Amorcer un mouvement, un changement de position. Prendre le trot, le galop. L’oiseau prit son vol. Prendre le départ, prendre un mauvais départ. Prendre la fuite. Il a pris appui sur le rebord de la fenêtre. Prendre pied sur le rivage, débarquer. Marque de domaine : marine. Prendre la mer, commencer un voyage en mer. Prendre le large, s’éloigner du rivage et, fig. et fam., quitter un endroit, s’enfuir. Prendre la haute mer. Prendre terre, prendre port, aborder en quelque endroit.
▪  Expr. Prendre de l’élan, prendre son élan, se préparer, par une brève course, à accomplir un saut, un exercice sportif. Prendre de l’avance, du retard, gagner ou perdre du terrain et, fig., gagner ou perdre du temps par rapport à ce que l’on avait prévu. Prendre du recul, s’éloigner de l’endroit où l’on était, se mettre en retrait et, fig., se donner le temps de la réflexion pour apprécier une situation. Prendre position en un lieu, s’y installer et, fig., prendre position dans un débat, une discussion, s’engager, soutenir une opinion. L’armée a pris position au sommet de la colline. Zola et Clemenceau prirent position en faveur de Dreyfus. Prendre la tête de, se placer à l’avant lors d’une marche, d’un défilé, etc. et, fig., devenir le chef d’un groupe. Il a pris la tête du peloton. Catilina prit la tête des factieux à Rome en 64 avant Jésus-Christ. Fig. Prendre le dessus, obtenir l’avantage dans un combat, un débat, etc.
2.  Gagner en, acquérir, en parlant de caractéristiques physiques ou morales. Prendre des forces, de l’assurance. Prendre de l’âge. Prendre du ventre. Son projet a pris corps, a pris forme. Leur maison prendra de la valeur. Le sucre a pris la consistance d’un sirop. Cette affaire prend un bon tour. Cela prend mauvaise tournure.
▪  Par extension. Commencer d’éprouver, de concevoir. Prendre patience, courage. Il prend goût à sa nouvelle vie. Prendre intérêt à quelqu’un, à quelque chose. Prendre plaisir, du plaisir à relire les auteurs classiques. Il la salua si froidement qu’elle en prit de l’humeur. Prendre ombrage d’une situation. Elle prit peur et s’enfuit.
▪  Expr. Prendre naissance, prendre fin, en parlant d’une chose, commencer ou s’achever. Prendre feu, voir Feu I. Prendre la mouche (fig. et fam.), se piquer, se fâcher mal à propos ou sans motif. Prendre racine, en parlant d’un végétal, se fixer dans le sol et commencer à se développer et, par extension, s’implanter ; fig. et fam., se dit d’un visiteur, d’un invité qui s’attarde jusqu’à devenir importun. Prendre sa source en un lieu, naître, apparaître, en parlant d’une rivière, d’un fleuve et, fig., en parlant d’un évènement, d’un sentiment. La Seine prend sa source au plateau de Langres. Les préjugés prennent leur source dans l’ignorance ou la peur. Marque de domaine : droit. Prendre effet, en parlant de textes législatifs ou règlementaires, devenir applicables ou exécutoires. Le contrat prendra effet à compter du premier janvier. – Marque de domaine : marine. Prendre de la gîte, en parlant d’un voilier, s’incliner sur un bord.
▪  Spécialement. En parlant d’un mot, recevoir telle ou telle marque, avoir tel ou tel trait. En français, les noms prennent généralement un « s » au pluriel. L’infinitif peut parfois prendre une valeur nominale. En allemand, les noms communs prennent une majuscule.

II.

II. Verbe intransitif.
1.  Produire l’effet attendu, réussir. La teinture, la couleur n’a pas pris. Cette encre ne prend pas sur ce type de papier. La vigne ne prend pas dans cette région, n’y croît pas aisément. La greffe a bien pris. Fig. Cette mode n’a pris qu’à Paris. Cet argument ne prendra pas sur lui. Expr. fam. Cela ne prend pas, ne prend plus ! se dit pour signifier à quelqu’un qu’on ne le croit pas ou plus, que l’on ne se laissera pas ou plus duper.
▪  Spécialement. Devenir solide, épaissir, durcir. Cette gelée ne prend pas. Pour que la mayonnaise prenne, vous devez ajouter l’huile petit à petit sans cesser de battre. Le ciment, le plâtre a pris. La rivière a pris, a gelé. En parlant d’une matière combustible. S’enflammer. Le bois prend mieux quand il est bien sec. Par métonymie. La pluie est tombée : le feu ne prendra pas.
2.  Avoir pour point de départ, débuter. Le sentier prend derrière l’église. Les plis de cette robe prennent à la taille. L’incendie a pris dans la cuisine.
▪  Par extension. Se manifester, surgir soudainement chez quelqu’un. L’envie leur a pris de partir. La douleur lui a pris (vieilli). Fam. Qu’est-ce qui lui prend ? Qu’est-ce qui leur a pris de parler ainsi ? Impers. Il vous prend parfois d’étonnantes idées. Dans des formules indiquant la satisfaction ou le regret. J’ai dit non, et bien m’en a pris. Mal lui en a pris d’être aussi curieux.

III.

III. Verbe pronominal.
1.  S’accrocher, se laisser attraper. Ma robe s’est prise à un clou. Un dauphin s’est pris dans le filet de pêche. Il s’est pris les doigts dans la porte.
▪  Expr. fig. Se prendre les pieds dans le tapis (fam.), se tromper. Se prendre à quelqu’un (vieilli), le provoquer, lui chercher querelle. On emploie aujourd’hui la forme S’en prendre à quelqu’un. Il s’en est pris à moi. Si les choses ont mal tourné, vous ne pouvez vous en prendre qu’à vous-même.
▪  Fig. Se laisser séduire. Se prendre au charme d’une musique, d’un pays. Expr. fam. Se prendre au jeu, se laisser entraîner par le plaisir qu’il procure et, par extension, poursuivre avec sérieux une action entamée de façon légère.
2.  Avec le pronom adverbial y. Accomplir, mener une affaire de telle ou telle manière. S’y prendre bien, mal. S’y prendre de travers. Il a dû s’y prendre à deux fois pour mettre le moteur en route. Elle s’y est prise trop tard. Elle sait s’y prendre avec les enfants, comment s’y prendre.
▪  Expr. fig. et pop. S’y prendre comme une corneille qui abat des noix, agir avec un zèle maladroit. S’y prendre comme un pied, comme un manche, très mal.
3.  Commencer, se mettre à. Avec un infinitif introduit par à. Elle se prit à rire, à pleurer.
▪  Avec un complément introduit par de. Se prendre d’amitié, d’affection, de passion pour quelqu’un, éprouver soudainement ce sentiment. Elle s’est prise immédiatement d’aversion pour lui.
▪  Expr. Se prendre de querelle ou, fam., se prendre de bec avec quelqu’un, se quereller, avoir un démêlé avec lui. Vieilli. Se prendre de parole avec quelqu’un, échanger des propos offensants.
4.  En parlant d’une substance. Devenir solide, se figer. L’étang s’est pris.
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