rompre

4e édition

ROMPRE.

v. a. Conjugaison : Je romps, tu romps, il rompt. Nous rompons, &c. Je rompois. Je rompis. J’ai rompu. Je romprai. Romps. Que je rompe. Que je rompisse. Je romprois, &c.
■  Briser, casser, mettre en pièces. Rompre un coffre. Rompre une porte. Rompre un bâton, une baguette. Rompre un gâteau. Il ne faut rien donner aux enfans, ils rompent tout. Un coup de vent a rompu le grand mât. C’est un homme violent, il menace de tout rompre. Il menace de lui rompre bras & jambes. Il lui rompit sa canne sur le dos. Il a le bras rompu en deux endroits. Se rompre une veine dans le corps. Se rompre une côte. Il fit un effort qui lui rompit les reins. En tombant de cheval, il s’est rompu le cou.
On dit par exagération, Se rompre l’estomac à force de vomir. Les efforts qu’il a faits en vomissant, lui ont tout rompu l’estomac.
On dit figurément, Rompre le cou à quelqu’un, pour dire, Lui faire perdre sa fortune. Il avoit lieu de tout espérer à la Cour, mais la malice d’un ennemi lui a rompu le cou.
On dit figurément, Rompre le pain de la parole de Dieu aux Fidelles, pour dire, Prêcher la parole de Dieu.
On dit, Rompre un criminel, pour dire, Rompre les os à un criminel avec une barre de fer. On l’a rompu vif. Condamné par Arrêt à être rompu.
En matière de joutes & de tournois, on dit, Rompre une lance, rompre la lance, pour dire, Briser une lance en courant ou en combattant contre quelqu’un. Ils rompirent deux lances, trois lances. Et on dit figurément, Rompre une lance pour quelqu’un, pour dire, Prendre le parti de quelqu’un dans une conversation où on n’en parloit pas bien. J’ai rompu bien des lances pour vous.
On dit figurément, Rompre en visière, pour signifier, Dire en face & brusquement quelque chose de fâcheux, de désobligeant à quelqu’un.
On dit en termes de Guerre, Rompre un bataillon, un escadron, pour dire, Enfoncer un bataillon, un escadron, le mettre en désordre. Il fallut amener du canon pour rompre les bataillons. Quand son Infanterie eut été rompue… La première ligne des ennemis fut rompue.
On dit figurément, Rompre ses chaînes, pour dire, S’affranchir, se mettre en liberté. Et on dit aussi, Rompre ses fers, ses chaînes, ses liens, pour dire, Se délivrer d’une passion, d’un attachement. Il a quitté son péché, il a rompu ses liens. Il n’est plus dans cet engagement, il a rompu ses chaînes.
On dit aussi figurément dans une acception semblable, Rompre un enchantement.
On dit encore figurément, Rompre l’eau à un cheval, pour dire, Interrompre un cheval quand il boit, l’obliger à boire à différentes reprises. Rompez l’eau à votre cheval.
On dit proverbialement & figurément, Rompre la glace, pour dire, Faire les premiers pas dans une affaire, en surmontant les premières difficultés.
On dit figurément & proverbialement, Rompre la tête à quelqu’un, pour dire, Lui faire trop de bruit, ou l’importuner par des discours inutiles & hors de saison. On dit dans le même sens, Rompre les oreilles. Vous nous rompez toujours les oreilles de la même chose. Et on dit, Se rompre la tête à quelque chose, pour dire, S’y appliquer trop fortement ou inutilement.
On dit, Rompre les chemins, pour dire, Gâter les chemins. Les pluies, le dégel, les charrois ont fort rompu les chemins. Les chemins sont fort rompus en hiver. Et on dit, Rompre les passages, rompre les ponts, rompre les gués, pour dire, Les rendre impraticables, pour n’être pas atteints par ceux qui nous suivent. Comme la Cavalerie ennemie nous suivoit, nous rompîmes les ponts.
Rompre, signifie aussi, Arrêter, détourner le mouvement droit de quelque corps. Rompre le vent. Rompre le fil de l’eau. Rompre le cours de l’eau. Rompre la vague. Rompre l’impétuosité des vagues.
Rompre, en Dioptrique, se dit Des milieux qui occasionnent la réfraction, qui obligent les rayons de lumière de se détourner de leur première direction. Tous les fluides ont la propriété de rompre les rayons de lumière qui y entrent.
On dit figurément, Rompre le fil de son discours, pour dire, Quitter tout à coup la suite de son discours, & entrer dans une autre matière.
Dans la pratique du coloris, Rompre les couleurs, signifie, Mêler ensemble plusieurs teintes. Dans la nature, les reflets rompent les couleurs, ces ruptures forment l’harmonie de la couleur.
Rompre, en parlant D’amitié, de commerce, d’alliance, de traité, &c. signifie figurément, Détruire, faire cesser, rendre nul. Rompre l’amitié. Rompre un traité, une alliance, un marché. Rompre la paix. Rompre la conversation, l’entretien. Rompre le commerce qu’on avoit avec quelqu’un. Rompre tout commerce de lettres.
Il se met aussi absolument, pour dire, Rompre l’amitié, la bonne intelligence qu’on avoit avec quelqu’un. Ils ont rompu. Ils ont rompu ensemble. Ils ont rompu avec éclat. Il a rompu pour une bagatelle avec son meilleur ami. Et dans ce même sens, on dit figurément & proverbialement, Rompre la paille.
On dit aussi figurément, Rompre un mariage, pour dire, Rompre un projet de mariage. Et, Rompre son voyage, pour dire, Ne pas faire un voyage qu’on avoit résolu de faire.
On dit, Rompre le camp, pour dire, Renvoyer les troupes dans leurs quartiers. Et on dit, qu’Un Prince a rompu son armée, pour dire, qu’Il l’a congédiée.
On dit dans le même sens, Rompre une Assemblée, une Diète, pour dire, Faire cesser, congédier une Assemblée, empêcher que la Diète ne continue.
On dit aussi, Rompre sa maison, son train, pour dire, Congédier son train, sa maison : Rompre sa table, pour dire, Cesser de tenir table : Et, Rompre son ménage, pour dire, Cesser de tenir ménage.
On dit figurément, Rompre le sommeil de quelqu’un, pour dire, Éveiller quelqu’un, troubler le sommeil de quelqu’un.
On dit en termes de Chasse, Rompre les chiens, pour dire, Les empêcher de continuer la chasse. Et proverbialement & figurément, pour dire, Empêcher qu’un discours qui pourroit avoir quelque mauvaise suite, ne continue.
On dit au jeu des dés, Rompre le dé, rompre le coup, pour dire, Brouiller les dés que jette celui contre qui on joue, avant qu’on ait pu voir ce qu’ils marquent. Il rompt le dé à tous momens. Je vous romps ce coup-là. Et on dit figurément, Rompre un coup à quelqu’un, pour dire, Empêcher qu’il ne réussisse en quelque chose qu’il avoit entrepris. Vous lui avez rompu son coup, rompu un beau coup.
On dit en termes d’Escrime, Rompre la mesure à celui contre qui on fait des armes, Lorsqu’on le met hors d’état de porter le coup qu’il vouloit.
On dit dans le même sens, Rompre le dessein, les desseins de quelqu’un, lui rompre ses mesures, pour dire, Empêcher qu’il n’exécute son dessein, qu’il ne réussisse dans les mesures qu’il avoit prises.
On dit encore figurément, Rompre la volonté, l’humeur d’un enfant, pour dire, L’accoutumer à n’avoir point de volonté.
Rompre, se dit encore figurément, en parlant Des manquemens qu’on fait à l’égard des choses auxquelles on est obligé. Rompre la clôture religieuse. Rompre son jeûne. Rompre le Carême. Rompre sa règle, ses vœux. Rompre son serment.
On dit dans une acception à peu près semblable, Rompre sa prison, pour dire, S’évader de prison. Et, Rompre son ban, pour dire, Ne pas garder son ban, sortir des lieux où l’on étoit relégué.
Rompre, signifie encore figurément, Styler, dresser, exercer. Ainsi on dit, Rompre un homme aux affaires, pour dire, Rendre un homme habile, expérimenté dans les affaires. On l’a mis dans un tel emploi pour le rompre aux affaires. En ce sens on dit, Rompre la main d’un jeune homme à l’écriture, le rompre à l’écriture, pour dire, L’exercer à écrire. Et l’on dit, Rompre un cheval, pour dire, Débourrer un cheval, l’assouplir.
Rompre, est quelquefois neutre, comme en ces phrases, Cet arbre est si chargé de fruits, qu’il en rompt. Tous les arbres rompoient de fruits. Ne chargez pas trop cette poutre, elle rompra. Son épée rompit à la poignée.
On dit proverbialement, Vous verrez beau jeu, si la corde ne rompt, pour dire, Vous verrez des choses qui vous étonneront, qui vous surprendront, si les moyens dont on se sert pour les faire réussir ne manquent pas.
On dit proverbialement & figurément, qu’Il vaut mieux plier que rompre, pour dire, qu’Il vaut mieux céder que de se perdre. Et l’on dit, Il rompra plutôt que de plier, pour dire, Il périra plutôt que de céder.
Rompre, est aussi réciproque. Il ne faut pas trop charger cette poutre, de peur qu’elle ne vienne à se rompre. Les soupentes du carrosse se rompirent. Les flots se rompent contre le rivage. Les rayons se rompent en passant de l’air dans l’eau.
À tout rompre. Façon de parler adverbiale. Tout au plus, à toute extrémité. Cette terre-là à tout rompre ne vaut pas dix mille livres de rente. Qu’il fasse son compte comme il voudra, mais à tout rompre on ne lui doit pas mille écus. Il est du style familier.
Rompu, ue. participe.
On dit par exagération, en parlant d’Un homme extrêmement fatigué, qu’Il est tout rompu de fatigue.
En Arithmétique, on appelle Nombre rompu, Une fraction, une partie d’unité. Un quart, un tiers, deux tiers, trois quarts, quatre cinquièmes, sont des nombres rompus.
Rompu, en termes de Blason, se dit Des chevrons dont la pointe d’en haut est coupée.
On appelle Bâtons rompus, Certaines pièces de compartiment dans des vîtres & dans d’autres ouvrages ; comme aussi Une sorte de tapisserie où l’on représente plusieurs bâtons rompus, & entremêlés les uns dans les autres.
À bâtons rompus. Façon de parler adverbiale, qui se dit Des choses qui se font avec de fréquentes interruptions & à diverses reprises. Travailler à quelque chose à bâtons rompus. Je n’ai pu entendre ce discours qu’à bâtons rompus.
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