maître, maîtresse

I. MAÎTRE, MAÎTRESSE

nom
Étymologie : xie siècle, maistre. Issu du latin magister, « chef ; maître d’école ».
↪ voir aussi : II. Maître, maîtresse (adj.)

I.

I. Celui, celle qui commande, qui domine, soit de droit, soit de fait.
1.  Personne qui en dirige d’autres selon sa volonté, qui tient des hommes, des lieux sous son autorité. Agir, parler, décider en maître. Faites comme il vous plaira, vous êtes le maître. Chacun est maître chez soi. La maîtresse du logis. Le capitaine d’un navire est seul maître à bord. Il est le maître absolu dans son village, dans sa région. L’Angleterre fut longtemps maîtresse des mers. Marque de domaine : religion. Le maître de l’univers, Dieu.
▪  Ni Dieu, ni maître, devise des anarchistes.
▪ Loc. Seigneur et maître, par allusion à l’hommage dû par le vassal à son seigneur, se dit de la personne qui possède toute autorité sur une autre et, parfois plaisamment, du mari par rapport à la femme. Une maîtresse femme, qui montre de l’énergie, de la fermeté dans ses entreprises, et qui sait se faire obéir. Maître, maîtresse de maison, désigne la personne qui reçoit des hôtes, des visites. Saluer la maîtresse de maison. En parlant de la femme qui veille à la marche du ménage, aux affaires domestiques. Une bonne maîtresse de maison.
▪ Expr. Se rendre maître d’une place, d’une position, s’en emparer par la force, les conquérir. César se rendit maître de la république. Fig. Se rendre maître des esprits, des cœurs, prendre de l’empire sur les esprits, gagner les cœurs.
▪  Être, rester maître de, tenir, garder sous son pouvoir, sous son contrôle. L’ennemi est resté maître du champ de bataille. Fig. Être maître de ses passions, les dompter, les vaincre. Être maître de soi, se posséder, se dominer. Cet historien est maître de son sujet, il en a une connaissance approfondie.
▪  Être le maître de ou être maître de, avoir la liberté, le pouvoir de. Il est maître d’agir comme bon lui semble, maître de son choix. Vous êtes maître d’accepter ou de refuser. Être son maître, son propre maître, ne dépendre de personne, agir librement.
▪ Marque de domaine : Jeux de cartes. Être maître, avoir dans son jeu les cartes les plus fortes.
▪  Prov. Charbonnier est maître chez soi, chacun, si humble soit-il, vit chez soi comme il lui plaît.
2.  Personne qui, ayant des hommes, des femmes à son service, a autorité sur eux. Maître et esclave, maître et serviteur. Servir son maître. Bon maître, mauvais maître. Cette servante était toute dévouée à sa maîtresse, à ses maîtres. Devenir son maître, ne plus dépendre de personne.
▪  Prov. Tel maître, tel valet, les valets prennent les habitudes de leurs maîtres. Nul ne peut servir deux maîtres, on ne peut défendre en même temps deux causes qui s’opposent, deux opinions qui se contredisent. L’argent est bon serviteur et mauvais maître.
 Titre célèbre : Arlequin, serviteur de deux maîtres, de Carlo Goldoni (1748).
3.  Personne qui possède quelque chose ; propriétaire. Être maître d’une terre, d’un domaine. Maître de forges (anciennement), voir Forge. Maître d’équipage, celui qui possède ou dirige un équipage de chasse. Marque de domaine : Droit. Biens vacants et sans maîtres, qui appartiennent alors à l’État.
▪ Loc. Maison de maître, belle maison faisant partie d’un domaine. Cheval de maître, voiture de maître, par opposition à cheval, voiture de louage.
▪ S’emploie particulièrement en parlant des animaux. Ce chien a été abandonné par son maître. Cet animal a reconnu la voix de son maître.
▪ Expr. fig. L’œil du maître, l’autorité qui veille à la bonne exécution de travaux en cours. Il n’y a rien de tel que l’œil du maître.

II.

II. Par extension.
1.  Personne qui détient une supériorité reconnue en quelque domaine particulier. C’est un maître dans sa discipline. Les maîtres de l’art. Les maîtres de l’Antiquité, de l’âge classique. Expr. fig. Trouver son maître, avoir affaire à plus fort, à plus habile que soi. Loc. De main de maître, en connaissant tous les secrets d’un métier, avec une habileté consommée, et, par extension, avec autorité, avec esprit de décision. Un travail exécuté de main de maître. Il a mené la négociation de main de maître. Coup de maître, action d’éclat, réussite exceptionnelle et inattendue.
▪ Se dit particulièrement des peintres, sculpteurs, musiciens. Les maîtres de l’école siennoise, de l’école française. Les maîtres espagnols, flamands. Une toile de maître. Ce tableau n’est pas du maître, mais de son atelier. Maîtres anonymes, artistes dont le patronyme est inconnu. (On désigne souvent ces artistes par référence à une œuvre, à un lieu ou à un commanditaire. Le maître du Parement de Narbonne, le maître de Moulins.) Petit maître, artiste cultivant un genre considéré comme mineur. Les petits maîtres du xviiie siècle.
▪ Par extension. Fam. et vieilli. Petit-maître, petite-maîtresse, celui, celle qui se faisait remarquer par une élégance affectée, des manières coquettes, prétentieuses.
2.  Personne qui transmet un savoir, forme les autres à son modèle. Le maître et ses élèves. Le maître a reçu l’hommage de ses disciples. Cet enfant travaille à la satisfaction de ses maîtres. Maître d’armes. Maître de danse, de musique. Maître nageur.
▪  Maître, maîtresse d’école, instituteur, institutrice. Maître d’étude ou maître d’internat, qui, dans les collèges, les lycées ou les internats, surveille les élèves et sert de répétiteur. Maître, maîtresse de pension (vieilli), qui prenait des enfants en pension pour les instruire. Maître auxiliaire, voir Auxiliaire. Maître de conférences, voir Conférence. Anciennement. Maître ès arts, qui avait reçu, dans une université, les degrés qui permettaient d’enseigner les humanités et la philosophie.
▪ Loc. Maître à penser, celui auquel on reconnaît une influence intellectuelle sur un groupe d’individus, sur une ou plusieurs générations.
3.  Spécialement. Au féminin. Se disait autrefois de la femme exerçant son empire sur l’homme qui l’aime et la courtise. Dans « Le Cid », Chimène est la maîtresse de Rodrigue.
▪ Désigne aujourd’hui une femme qui a une liaison avec un homme en dehors du mariage. Elle est sa maîtresse, l’une de ses maîtresses.
 Titre célèbre : Une vieille maîtresse, de Jules Barbey d’Aurevilly (1851).

III.

III. Titre en usage dans de nombreux domaines d’activité pour désigner une personne à qui l’on reconnaît une compétence particulière, une aptitude à diriger.
1.  Artisan, ouvrier qui, après avoir été apprenti puis compagnon, est reçu dans un corps de métier. Maître tailleur. Maître horloger. Ce compagnon a obtenu le titre de maître ou est passé maître. Fig. Il est passé maître en fourberie, c’est un grand fourbe. Un maître sot, un homme particulièrement sot. Un maître coquin. Maître fripon.
▪ Spécialement. Maître chanteur, individu qui pratique le chantage.
2.  Artisan qui emploie ou dirige plusieurs ouvriers, est à la tête d’un atelier ou d’une entreprise. Maître, maîtresse d’atelier. Maître de chai, dans les exploitations viticoles. Marque de domaine : bâtiment. Maître d’œuvre, qui a la direction de l’ensemble des travaux effectués et la responsabilité de leur bonne exécution devant le maître d’ouvrage, qui lui a commandé ces travaux.
3.  Dans divers domaines d’activité. Maître d’hôtel, voir Hôtel. Maître queux, chef des cuisiniers d’une grande maison. Maître coq, chef des cuisines, notamment à bord d’un navire. Maître des cérémonies, voir Cérémonie. Maître de ballet. Maître de chapelle, celui qui dirige la musique dans une église. Marque de domaine : Marine. Maître d’équipage ou, simplement, maître, premier sous-officier de manœuvre qui, sous les ordres des officiers, a autorité sur les matelots. Maître charpentier. Dans la Marine nationale, le mot Maître entre dans l’appellation du grade des officiers mariniers. Second maître, maître, premier maître, maître principal, dont le grade équivaut à celui de sergent, de sergent-chef, d’adjudant et d’adjudant-chef dans les autres armes. Quartier-maître, voir ce mot.
4.  Marque de domaine : histoire. Maître de la cavalerie, à l’époque de la République romaine, auxiliaire du dictateur, chargé du commandement de la cavalerie. Maîtres de la milice, à l’époque du Bas-Empire, hauts fonctionnaires qui faisaient office de ministres de la guerre et de généraux en chef. Maître des offices, à l’époque du Bas-Empire, chef des services centraux de l’administration impériale. Grand maître de l’artillerie, qui, en France, du xvie au xviiie siècle, était responsable du matériel et dirigeait les services civils ou les corps militaires chargés du maniement des bouches à feu. Maître de camp ou, plus souvent, mestre de camp, voir Mestre I. Grand maître de l’Université, titre porté, à diverses époques, par celui qui était placé à la tête de l’Université de France. Fontanes fut nommé en 1808 grand maître de l’Université.
5.  Grand maître, titre le plus élevé dans la hiérarchie d’un ordre de chevalerie, d’un ordre civil ou militaire. Grand maître des Templiers. Grand maître de l’ordre de Malte. Le président de la République est grand maître de l’ordre de la Légion d’honneur.
▪ Dans la franc-maçonnerie. Grand maître, chef d’une obédience maçonnique.

IV.

IV. Appellation d’usage (toujours à la forme masculine).
1.  Employée pour désigner les membres de certaines professions judiciaires, comme les avocats, avoués, notaires, commissaires-priseurs, huissiers de justice, ou pour s’adresser à eux (on écrit par abréviation Me).
▪ Spécialement. Maître des requêtes, membre du Conseil d’État, d’un rang intermédiaire entre celui de conseiller d’État et celui d’auditeur. En apposition. Conseiller maître à la Cour des comptes.
2.  Parfois employée, en signe de respect, pour s’adresser à une personnalité éminente des lettres, des arts, des sciences.
3.  Anciennement. Suivie d’un nom ou d’un prénom, pour s’adresser à des personnes de condition paysanne ou ouvrière tenant un certain rang dans leur milieu. Par extension. Plaisamment, dans des contes, des fables. Maître Goupil. Maître Corbeau.
▪ Spécialement. Maître Jacques, voir Jacques. Maître aliboron, voir Aliboron.
Orthographe
◇ Peut s'écrire maître, maîtresse (n.) ou maitre, maitresse, selon les rectifications orthographiques de 1990.
[règle §3] Les accents et le tréma • accents circonflexes sur î et û.
Voir aussi
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