en

I. EN

préposition
Étymologie : ixe siècle. De la préposition du latin in, « dans, en, sur », en parlant de l’espace et du temps. En devant l’article ayant abouti à des formes complexes telles que en le contracté en enl, el, ou, et en les, contracté en els, ès (voir ce mot), il a perdu beaucoup de ses emplois au profit de dans — devenu courant seulement à la fin du Moyen Âge —, mais figure dans de nombreux emplois figés à date ancienne et sans article.
↪ voir aussi : II. En (pr. adverbial)

I.

I. En introduit divers compléments circonstanciels.
A.  Compléments circonstanciels de lieu.
1.  En sert à marquer une localisation ou une direction vers un lieu. En ville, en pleine ville, en pleine rue, en pleine campagne. Habiter en banlieue. Être à l’hôpital, en salle commune. Avoir de l’argent en poche, en caisse. Mettre en prison. Porter en terre. De fleur en fleur. Recevoir un coup en plein visage, en pleine poitrine. Aller en ville. Fig. Tomber de Charybde en Scylla. De fil en aiguille. De mal en pis. Avoir un projet en tête, des centaines de vers en mémoire. En mon âme et conscience. Mourir en Dieu. Se mettre martel en tête. Par extension. S’emploie pour délimiter une quantité. Cela fait cinq en tout. En vingt, combien de fois quatre ?
2.  En introduit une activité, un état ou une situation déterminée. Être en affaires, en pourparlers, en apprentissage, en conférence, en consultation, en procès. Se mettre en grève. Être en activité, en fonction, en observation. Entrer en religion. Être en liesse. Être en vie. Être en péril de mort. Fam. Être en forme, en pleine forme.
3.  En peut également conserver le sens ancien de sur. Christ en croix. Casque en tête. Mettre un genou en terre. Être en chemin. Être en selle, en croupe.
4.  Emplois de en avec les noms de pays, d’îles, de départements, de villes, etc.
▪ Les noms de pays au féminin, ou au masculin à initiale vocalique, se font précéder de la préposition en. Être, aller en Chine, en France, en Indonésie, en Algérie, en Israël. Au contraire, les noms de pays au masculin à initiale consonantique se font précéder de au. Au Brésil, au Japon, au Danemark.
▪ Les noms de certaines grandes îles demandent la préposition en. En Corse, en Crète, en Sardaigne, en Irlande, en Islande, en Nouvelle-Calédonie, mais à Cuba, à Madagascar, à Tahiti, à Terre-Neuve.
▪ Les noms de province ou de région sont également précédés de la préposition en s’ils sont au singulier et au féminin. En Auvergne, en Anjou, en Lombardie, en Bavière. Roissy-en-France, Dammartin-en-Goële, Sucy-en-Brie.
▪ Les noms de département formés de deux noms reliés par et demandent la préposition en, sauf lorsque le premier de ces noms est masculin. En Maine-et-Loire, en Meurthe-et-Moselle, en Seine-et-Marne, mais dans le Tarn-et-Garonne, dans le Loir-et-Cher.
▪ Litt. ou régional. Devant certains noms de villes commençant par la lettre a. En Arles, en Avignon.
B.  Compléments circonstanciels de temps.
1.  En sert à marquer la localisation dans le temps. En ce temps-là, en cette saison, en semaine, en temps de paix. En mai, en septembre. En été, en automne, en hiver, mais au printemps. En plein jour, en pleine nuit.
2.  En, en correspondance avec de, sert à indiquer le passage d’un moment du temps à un autre. De temps en temps, de moment en moment, de jour en jour. Je viendrai de demain en huit, en quinze.
3.  En sert à marquer la durée nécessaire à l’accomplissement d’une action. Faire un travail en huit jours. En un instant, en un clin d’œil, en une nuit.
C.  Autres compléments circonstanciels.
1.  Cause. Agir en haine de la société. En considération de son passé. En mémoire d’une victoire.
2.  But. Aller en vacances, en villégiature, en mission, en guerre, en voyage, en promenade. Se mettre en campagne.
3.  Moyen. S’exprimer en grec, en français. Payer en espèces, en nature. Sauter en parachute. Franchir l’océan en bateau, en avion. En voiture, en auto, en traîneau, mais à bicyclette, à moto.
4.  Manière. Pour caractériser une modalité de l’action, de l’état ou du sujet. Se confondre en excuses. Tomber en décrépitude. Être, se mettre en colère. Arriver en avance, en retard. Se ruiner en folles dépenses. S’épuiser en vains efforts. Grandir en sagesse, en vertu. Prendre en enfilade. Écrire en ronde, en cursive, en abrégé, en sténographie.
▪ Pour indiquer le résultat d’une transformation, d’un processus. Mettre un poème en musique. Traduire en espagnol. La chrysalide se transforme en papillon. S’en aller en fumée. Se résoudre en pluie. Son amour tourna en aversion. Réduire en bouillie, en chair à pâté, en capilotade. Couper en morceaux. Diviser en deux, en trois, en quatre parties ou, elliptiquement, en deux, en trois, en quatre, etc.
▪ Pour caractériser la tenue, l’apparence extérieure. Être en deuil, en bleu, en veston, en tailleur, en manches de chemise, en bras de chemise, en habit, en civil, en uniforme, en grande tenue. Être en beauté. Dans un emploi vieilli. Sortir en cheveux, sans chapeau.

II.

II. En introduit des compléments d’objet indirect et diverses locutions.
A.  En introduit des compléments d’objet indirect de verbes ou de substantifs correspondants. J’espère en votre indulgence. Croire en Dieu. Avoir confiance en son prochain.
B.  En sert à créer des locutions verbales, adverbiales ou prépositives dont le sens est donné au mot principal.
1.  Locutions verbales. Être en charge. Prendre en main. Être en attente, en chasse, en panne, en instance, en sursis, en liberté provisoire. Mettre en gage, en dépôt. Mettre en vente. Mettre en cause. Mettre en doute. Avoir en horreur. Prendre en amitié, en bonne, en mauvaise part. Fondre en larmes. Éclater en sanglots. Être en appétit, en sommeil, en joie, en veine.
2.  Locutions adverbiales. En général, en apparence, en réalité, en vérité, en fait, en secret, en cachette, en silence, en face, en zigzag, en résumé, en gros, en détail, en vrac, en foule, en bandes, en catimini, en tapinois, en privé, en public, en puissance, en vain, en entier, en froid, en règle générale, en bonne justice, en toute conscience, etc.
3.  Locutions prépositives. En avant de, en arrière de, en travers de, en haut de, en bas de, en face de, en présence de, en cachette de, en cas de, en tête de, en cours de, en quête de, etc.

III.

III. En introduit d’autres éléments grammaticaux.
A.  Attribut du sujet ou du complément d’objet. Agir en homme d’honneur, en père. Répondre en soldat. Il l’a pris en traître. Traiter quelqu’un en ami. Accueillir en héros. Livrer en otage à l’ennemi.
B.  Complément de nom servant à caractériser
1.  La forme, l’apparence. Christ en majesté. Portrait en pied. Fenêtre en ogive. Construction en pyramide. Barbe en pointe. Un poème en quatre chants, une comédie en cinq actes, un ouvrage en deux volumes. Des troupes en éventail, en ordre, en désordre. Du blé en herbe, une vigne en fleur, une terre en friche. Par extension. Une idée en germe. Une théorie en vogue, en déclin. Un mot en usage. Une succession en déshérence. L’homme en société.
2.  La matière. Une dent, une montre en or, en acier. Une table en marbre. Une figure en glaise. Un manteau en laine. (Il y a concurrence entre en et de dans ce domaine. En indique plus nettement la matière, mais se prête moins à des emplois figurés.)
▪ Le domaine, le point de vue. Graveur en médailles, peintre en miniatures. Docteur en médecine, en droit. Spécialiste en électronique.
3.  On peut ajouter à ces compléments ceux qui donnent une précision supplémentaire. Général en chef. Commandant en chef, en second. La récolte en blé, en vin. De façon analogue, certains adjectifs se construisent avec la préposition en. Abondant en fruits. Chiche en paroles. Fécond en imagination. Fertile en inventions. Fort en thème. Nul en mathématiques.

IV.

IV. En sert à former le gérondif, qui a la valeur d’un complément circonstanciel de temps, de moyen, de manière, d’opposition.
Il est tombé en sautant trois marches à la fois. En travaillant, vous réussirez. Il marche en se dandinant. Dans le cas d’une valeur concessive, le gérondif est souvent précédé de tout. Tout en musardant, il réussit à ses examens.
▪ La langue actuelle exige le même sujet pour le verbe principal et le gérondif, alors que, jusqu’au xviie siècle, la construction pouvait être plus lâche, comme le prouvent les proverbes : La fortune vient en dormant ; L’appétit vient en mangeant.

V.

V. Construction du complément introduit par en.
▪ Dans la langue moderne, en n’est suivi de l’article défini que dans certaines expressions figées : en l’honneur de, en l’absence de, en l’espace de, en la société de, en l’église de, en la bonne ville de, en l’état, en la matière, en l’an 2000, ainsi que derrière certains verbes : croire en la fidélité, en l’avenir, espérer en la destinée.
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