abandonner

6e édition

ABANDONNER.

v. a.
■  Quitter, délaisser entièrement. Les gens de guerre le contraignirent d’abandonner sa maison. Il abandonna le pays. Abandonner un chemin pour en prendre un autre. Un soldat ne doit jamais abandonner son drapeau. C’était un crime chez les Grecs que d’abandonner son bouclier. La mer a abandonné une partie de cette côte. Abandonner une place, une province conquise. Abandonner sa femme et ses enfants. Dieu n’abandonne pas les siens. Vous m’avez abandonné dans le besoin, au besoin.
p. 5Ce père a abandonné son fils, l’a entièrement abandonné, Il ne prend plus aucun soin de lui, il ne s’en met plus en peine.
Les médecins ont abandonné ce malade, Ils ont cessé de le voir, ou Ils ne lui ordonnent plus rien, parce qu’ils désespèrent de sa guérison.
Abandonner, signifie quelquefois, Laisser échapper, ne pas retenir. Tenez ferme, n’abandonnez pas cette corde. N’abandonnez pas les rênes de ce cheval. N’abandonnez pas votre cheval. On dit dans un sens analogue, Abandonner les étriers, Retirer les pieds de dedans les étriers, et quelquefois, Perdre les étriers.
Abandonner, s’emploie figurément, et signifie, Renoncer à une chose, s’en désister. Abandonner la poursuite d’une affaire. Abandonner une cause. Abandonner un projet, un dessein, une entreprise. Abandonner une succession. Abandonner ses prétentions, ses droits. Abandonner un ouvrage. Abandonner la vertu, le vice. N’abandonnez pas l’étude de cette science.
Il se dit aussi Des facultés, des qualités physiques ou morales, lorsqu’elles viennent à nous manquer. Mes forces m’abandonnent. Son courage, sa prudence, sa présence d’esprit l’abandonna dans cette circonstance. L’appétit, le sommeil m’abandonne.
Abandonner, signifie encore, Laisser en proie, exposer, livrer ; et, dans ce sens, il est toujours suivi de la préposition à. Abandonner une ville au pillage, à la fureur des soldats. Abandonner un vaisseau à l’orage, au vent. Abandonner à la merci de, à la discrétion de, etc. Abandonner quelqu’un à son caractère, à ses penchants, à son mauvais sort.
Abandonner un ecclésiastique au bras séculier, c’était Le renvoyer au juge laïque, afin qu’il le punît selon les lois.
Fig. et fam., Abandonner au bras séculier, se dit en parlant De ce dont on ne se soucie plus, et dont on ne veut pas profiter. Les restes du dîner furent abandonnés au bras séculier, c’est-à-dire, furent laissés aux domestiques.
Dans le langage de l’Écriture, Dieu abandonne souvent les méchants à leur sens réprouvé, Il les laisse s’endurcir dans leur péché.
Abandonner une chose, une personne à quelqu’un, Lui permettre d’en faire, d’en dire ce qu’il lui plaira, lui en laisser l’entière disposition, lui laisser une entière liberté à son égard. Abandonner tous ses biens à ses créanciers. Je vous abandonne les fruits de mon jardin. Vous vous plaignez de cet homme : dites-en ce qu’il vous plaira, je vous l’abandonne.
Je vous abandonne ce point, Je vous l’accorde, je vous le concède, je renonce à le soutenir, à m’en prévaloir.
Abandonner, signifie quelquefois, Confier, remettre. Il a abandonné son fils, le soin de son fils à la conduite d’un sage gouverneur. J’ai abandonné le soin de mes affaires à un homme intelligent et probe.
Il s’emploie souvent avec le pronom personnel, et signifie, Se laisser aller, se livrer à quelque chose, à quelqu’un, sans aucune retenue, sans aucune réserve. S’abandonner à la débauche, au vice. S’abandonner aux passions. S’abandonner aux femmes. S’abandonner à la douleur, à la tristesse, aux pleurs. S’abandonner à la joie. Je m’abandonne à vous, à vos sages avis.
S’abandonner à la Providence, Se remettre entièrement entre les mains de la Providence. S’abandonner à la fortune, Laisser aller les choses au hasard.
C’est une femme qui s’abandonne à tout le monde, se dit D’une femme qui se prostitue. En ce sens, il s’emploie aussi absolument. Les mauvais exemples d’une mère portent quelquefois une fille à s’abandonner.
Abandonner, avec le pronom personnel, s’emploie de même absolument pour signifier, N’avoir plus confiance en soi, perdre courage. Si la fortune vous abandonne, ne vous abandonnez pas. Vous êtes perdu, si vous vous abandonnez.
Il signifie aussi, Se négliger dans son maintien, dans son habillement. Il s’abandonne trop. Il ne faut pas s’abandonner ainsi, lorsqu’on veut plaire.
Il signifie encore, Se laisser aller à des mouvements naturels. Ne vous roidissez pas, abandonnez-vous. Cet acteur ne s’abandonne pas assez.
Abandonné, ée. participe. Abandonné de Dieu, de ses amis, du médecin.
Prov., Il faut être bien abandonné de Dieu et des hommes pour faire telle chose, se dit D’une personne qui prend le plus mauvais parti, le plus contraire à ses intérêts, à ses goûts ; qui fait une chose honteuse ou dont les suites doivent être pour elle très-fâcheuses, très-nuisibles.
Un enfant abandonné, Un enfant qui se trouve sans secours, loin de ses parents.
Abandonné, est aussi substantif ; et alors il se dit d’Un homme perdu de libertinage et de débauche, et d’Une femme qui se prostitue. C’est un abandonné. C’est une abandonnée. Il est plus usité en parlant Des femmes.
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