emporter

7e édition

EMPORTER.

v. a.
■  Enlever, ôter d’un lieu. Il a fait emporter tous ses meubles de la maison. Emporter un malade, un homme blessé.
Il signifie particulièrement, Prendre une chose en un lieu, et la porter, l’avoir avec soi. La proie qu’un aigle emporte dans son aire. Emportez ce livre, vous le lirez à loisir. Emportez-le chez vous. Emporter des provisions. Je n’emporterai, pour mon voyage, que très peu de hardes. Il prit la fuite, en emportant les fonds qui lui avaient été confiés. On a dit figurément, sous la législation qui reconnaissait le droit d’aînesse, L’aîné emporte les deux tiers du bien, Les deux tiers du bien sont dévolus à l’aîné.
Il se dit quelquefois, figurément, en parlant Des choses morales. Je n’emporterai de ces lieux qu’un souvenir agréable. Le secret qu’il emporte avec lui dans la tombe. En nous quittant il a emporté tous nos vœux, il a emporté tous les cœurs.
Emporter, signifie encore, Entraîner, arracher, enlever, emmener avec effort, avec rapidité, avec violence. Son cheval prit le mors aux dents, et l’emporta à travers les champs, ou absolument, l’emporta. Les courants emportèrent le vaisseau. Le vent a emporté mon chapeau. Le carrosse entra si vite, qu’il faillit emporter la borne. Ce coup de canon lui a emporté une jambe. La rivière a emporté les ponts, les chaussées, etc. Un coup de fouet qui emporte la pièce.
Fig. et fam., Emporter la pièce, Railler, médire d’une manière cruelle. C’est un homme qui emporte la pièce.
Prov. et fig., Autant en emporte le vent, se dit en parlant De promesses auxquelles on n’ajoute pas foi, ou De menaces dont les effets ne sont point à craindre. Il me promet monts et merveilles, autant en emporte le vent. Ne vous alarmez pas de ses menaces, autant en emporte le vent.
Fam., Que le diable vous emporte, se dit Pour exprimer son dépit, sa mauvaise humeur, sa colère contre quelqu’un. Pour les autres locutions analogues, voyez Diable.
Emporter, se dit aussi, figurément, D’une maladie qui cause la mort. La peste emporte les gens en peu de jours. Cette maladie l’emportera. La fièvre l’a emporté.
Il signifie également, Détruire, faire disparaître. Il ne retira de sa créance qu’un millier de francs, les frais emportèrent le reste. Il se dit surtout en parlant De couleurs, de taches, etc. Le jus de citron emporte les taches d’encre, emporte la couleur des étoffes sur lesquelles il tombe.
Ce remède emporte la fièvre, Il la guérit.
Emporter, se dit encore figurément Des passions, et signifie, Tirer l’âme de sa situation ordinaire, jeter dans quelque excès blâmable. La colère l’emporta bien loin. Se laisser emporter à sa vengeance. La douleur l’a emporté jusqu’à dire, jusqu’à faire… La jeunesse se laisse emporter aux plaisirs.
Il s’emploie aussi avec le pronom personnel, et signifie alors, Se livrer à un excès d’orgueil, d’audace, et en général à un sentiment immodéré. Ce conquérant s’emporta jusqu’aux plus folles entreprises.
Il se dit absolument pour signifier, Se fâcher violemment, s’abandonner à la colère. S’emporter contre quelqu’un. Il s’emporte pour rien. Il s’emporte pour peu qu’on le contredise.
Il se dit également, D’un cheval qui se livre à sa vivacité, à sa fougue, et qui ne peut être retenu par celui qui le monte ou qui le conduit. Son cheval s’emporta. Les chevaux s’emportèrent, et la voiture versa. On dit quelquefois, dans un sens analogue, qu’Un chien de chasse s’emporte.
Emporter, signifie aussi figurément, Gagner, obtenir. Il emporta le prix sur tous ses rivaux. Dans son art il emporte le prix. Il emporta la gloire d’avoir triomphé de l’ennemi. Il s’y joint le plus souvent l’idée d’une sorte de violence. Cet homme a tant de crédit, qu’il emporte tout ce qu’il veut. Il emporta cette affaire à force de sollicitations.
Prov. et fig., Emporter quelque chose de haute lutte, L’emporter rapidement, malgré toute opposition.
Emporter une place, S’en rendre maître en peu de temps. Il emporta la place en quinze jours de tranchée ouverte. Emporter une place d’assaut, l’emporter d’emblée. On dit de même, Emporter un ouvrage l’épée à la main ; emporter un retranchement ; etc.
Prov. et fig., Emporter quelque chose à la pointe de l’épée, L’emporter avec de grands efforts.
Emporter, signifie encore, Avoir la supériorité, le dessus, prévaloir ; et alors il se joint avec le pronom le. Ce vin l’emporte sur tous les autres vins. Le diamant l’emporte sur toutes les autres pierreries. Virgile et Horace l’emportent sur tous les poètes latins. Il l’a emporté sur ses concurrents. L’amour l’emporte quelquefois sur la raison. Cet avis l’emporta. Sa fierté l’emporta sur ses intérêts.
Emporter, joint au même pronom, signifie p. 623aussi, Peser davantage. À volume égal, l’or l’emporte de beaucoup sur l’argent.
Fig., Emporter la balance, Déterminer la préférence. Cette considération emporta la balance.
Emporter, signifie aussi, Entraîner par une suite nécessaire ; Comprendre, impliquer. Dans quelques pays, la condamnation à mort emporte la confiscation des biens. La proposition générale emporta la proposition particulière. Le mot de vertu emporte presque toujours l’idée d’effort fait sur soi-même.
En termes de Procédure, La forme emporte le fond, se dit Pour exprimer que, dans le jugement d’un procès, la forme prévaut sur le fond, c’est-à-dire, qu’un simple défaut de forme peut faire échouer dans les prétentions les mieux fondées. On dit, dans le sens contraire, Le fond emporte la forme, Le fond prévaut sur la forme.
Emporté, ée. part. passé. Il eut le bras emporté d’un boulet de canon. Un bastion emporté par les assaillants. Des soldats emportes par leur ardeur.
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