de

6e édition

DE.

préposition.
■  Ce mot, dans le sens propre, sert à marquer Un rapport de départ, de séparation, d’extraction, de dérivation, d’origine, etc. (Lorsqu’il précède l’article masculin suivi d’une consonne ou d’une h aspirée, on le contracte en du, pour de le ; et lorsqu’il précède l’article pluriel des deux genres, on le contracte en des, pour de les. Devant un mot commençant par une voyelle ou une h non aspirée, l’e se retranche, et on le remplace par l’apostrophe.) Se mouvoir de haut en bas, de bas en haut. Descendre de cheval. S’éloigner de quelqu’un. Ôtez-vous de là. S’écarter de la droite ligne. S’écarter de la règle. Partir d’un lieu. À dater, à compter, à partir de ce jour. Aller d’une ville à une autre, de ville en ville. L’espace qui s’étend du fleuve à la montagne. Passer de la tristesse à la joie. Une chose transmise de père en fils, de génération en génération. Il arrive de Londres. D’où vient-il ? Il vient de Marseille, de l’église, du jardin. Il vient de loin, d’ici près. Cette rivière vient des Alpes. Le vent vient du nord. Ces marchandises ont été apportées de l’Inde. Arracher un clou de la muraille. Les mots qu’on a retranchés de ce passage. Délivrer quelqu’un de prison. Exclure, chasser quelqu’un d’une compagnie. On le retira d’une fondrière. Retirer quelqu’un du vice. L’huile qu’on extrait des olives. Le marbre qu’on tire d’une carrière. Les conséquences que l’on tire d’un principe. Que conclure, qu’inférer de cette réponse ? Je l’ai reçu de ses mains. Recevoir de toutes mains. Les nouvelles que je reçois de Paris. Il doit m’écrire de Cambray. Cette lettre est datée de Londres. Ce que j’attends de vous, de votre complaisance. Sortir de sa maison, de chez soi, de la ville, d’un pays. Après sa sortie de prison. L’eau qui jaillit d’un rocher. Les branches qui naissent du tronc. Le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Il descend de ces rois. Né de parents obscurs. Natif de telle ville. Originaire de tel pays. À cette acception se rapportent les locutions adverbiales : D’outre en outre. De part en part. De mieux en mieux. De plus en plus. De point en point. Etc.
Regarder, considérer, etc., du haut d’une montagne, de près, de loin, d’en bas, etc., Diriger ses regards vers un objet du haut d’une montagne, d’un lieu qui est proche, qui est loin, etc. On dit dans un sens analogue : Parler de loin, de près. Écouter de loin, de près. Etc.
Il vient de sortir, de partir, d’arriver, etc., Il n’y a qu’un moment qu’il est sorti, parti, arrivé, etc. On dit dans le même sens, Il ne fait que de sortir, de partir, etc.
De par le roi. Formule qui signifie, Au nom du roi, et qui se met au commencement de divers actes publics portant sommation, injonction, etc. On met aussi, en tête des jugements qui autorisent la saisie ou la vente des biens meubles et immeubles, De par le roi, la loi et justice.
Devant le mot Côté désignant un lieu, un endroit, ou une face de quelque objet, De reçoit plus fréquemment une valeur analogue à celle de Vers, dans, à, sur. Mettez-vous de ce côté-ci, vous verrez mieux. Il s’en est allé du côté d’Orléans. Voulez-vous que nous passions de l’autre côté ? Regardez bien de ce côté. Cette robe est plus longue de ce côté que de l’autre. On doit rapporter à cet alinéa les locutions suivantes : De côté et d’autre. D’un côté… de l’autre ou d’un autre. D’une part… d’autre part. D’une et d’autre part. De mon côté (Pour ce qui me regarde). Etc.
Se ranger, se mettre du parti de quelqu’un, Embrasser son parti.
De, sert particulièrement à marquer La relation d’une distance ou d’une durée quelconque avec le lieu, avec l’époque où elle commence. Paris est à trente lieues d’Orléans. Il était loin de moi, près de moi, auprès de moi, à deux pas de moi, à quelque distance de moi. Il se vit à deux doigts de sa perte. Distant de. Voisin de. Proche de. Approcher, s’approcher de quelqu’un (Venir à l’endroit qui est proche de quelqu’un). De la tête aux pieds. Nous verrons bien des choses d’ici à ce temps-là, d’ici là. D’aujourd’hui en huit. Du jeudi au dimanche. Du matin au soir. De temps en temps. D’heure en heure. De moment en moment.
Ils étaient de vingt à vingt-cinq, Leur nombre était entre vingt et vingt-cinq. Je serai chez vous de cinq heures à six, Je serai chez vous entre cinq et six heures. Etc.
De, s’emploie également dans certaines locutions pour marquer L’espèce de relation qui est entre les personnes ou les choses. Il y a une grande différence de l’un à l’autre, de cet homme à celui-là, etc. Différer du tout au tout. Traiter de puissance à puissance, d’égal à égal. De pair à compagnon. De Turc à More, etc. De vous à moi cela ne peut souffrir aucune difficulté.
Fam., Ceci est de vous à moi, ceci de vous à moi, Ceci doit rester secret entre vous et moi.
De, a quelquefois pour complément le mot qui désigne La personne ou la chose d’où part l’action qu’éprouve une autre personne, une autre chose ; et alors il équivaut à la préposition par. Se faire suivre de ses gens. Ce mot est quelquefois précédé de tel autre. Il voulait n’être vu de personne. Je ne suis pas connu de vous. Se faire aimer, se faire bien venir, se faire haïr de quelqu’un. Il est respecté de tous.
Il a souvent aussi pour complément le p. 473nom qui indique La matière, l’instrument, le moyen, l’objet indirect de l’action, la cause, etc. Il a fait de ce bloc une statue admirable. Il veut faire de son fils un avocat. Faire de nécessité vertu. Déjeuner d’un pâté. Avoir de quoi boire, de quoi manger. Frapper du pied la terre, le plancher. Se servir d’un couteau. Se munir de pistolets. S’armer de résolution. User d’adresse. Payer de ses deniers. Payer de sa personne. Envelopper de paille. Frotter d’huile. Charger de marchandises une voiture, un bateau. Dépouiller quelqu’un de ses habits. Combler de pierres un fossé, un puits. Élever de plusieurs pieds une digue, une muraille. Accabler de coups, de reproches. Pourvoir des choses necessaires. Priver quelqu’un de ses biens, de la vue. Accuser d’un crime. Enflammer de courroux. Ravir de joie. Toucher de compassion. Souffrir de la goutte. Souffrir des yeux, de la poitrine. Mourir de faim. Trembler d’effroi.
Traiter quelqu’un de lâche, le qualifier de traître ; se qualifier de prince, etc., Appeler quelqu’un traître, lâche ; prendre le titre de prince, etc. On dit de même, Taxer de folie, de sottise, etc.
Il suffit de cela, il y a assez de cela pour… Cela suffit pour… Il suffit de cela, il y a assez de cela pour mettre tout en combustion. On dit d’une manière analogue, J’ai assez, j’ai beaucoup, j’ai trop de cela, Cela me suffit, cela est beaucoup, est trop pour moi.
De, concourt pareillement avec l’expression qu’on lui donne pour régime, à indiquer La manière dont une action se fait, s’exécute, et quelquefois pour exprimer un état. Faire entrer quelqu’un de force. Frapper d’estoc et de taille. Jouer de bonheur, de malheur. Boire d’un seul trait. Franchir d’un saut, d’un bond. Être de travers. Regarder de côté. Parler d’abondance. Répondre de vive voix. D’une voix unanime. Peut-on se comporter de la sorte ? Je m’y prendrai de telle manière. De façon ou d’autre. Tous deux étaient d’intelligence. Ils ont agi de concert. Agir de soi-même, de son chef, de son propre mouvement. Aimer de tout son cœur. Cela va de soi. Posséder de fait. Succéder de droit, de plein droit.
Il s’emploie aussi après beaucoup de verbes, ou de locutions qui en tiennent lieu, dans le sens des mots Sur, touchant, concernant, relativement à. Je l’informerai de votre arrivée. Ce mot se dit de telle chose. Que pensez-vous de cela ? Médire de quelqu’un. S’ingérer, se mêler des affaires d’autrui. Parler d’une affaire. Trafiquer, faire trafic de quelque chose. Décider du sort de quelqu’un. Traiter de la paix. Ce chapitre traite de telle matière. Il ne s’agit point, il n’est point question de cela. Répondre de quelqu’un. Désespérer de sa guérison. Se méfier de quelqu’un. Féliciter quelqu’un d’un succès. Se repentir d’une faute. Se plaindre de quelqu’un. Faire justice d’un traître. S’apercevoir de quelque chose. Différer d’avis. Justifier de sa qualité. Rendre compte de sa gestion. Demander réparation d’une injure. Faire fi de quelque chose. Cela fait foi de ce que j’ai avancé. Il en sera de cela comme du reste. Pour ce qui est de lui. C’est fait de nous. Il y va de ma vie. Souvent, dans les titres d’ouvrages, de chapitres, etc., tout ce qui précède la préposition est sous-entendu ; ainsi on dit simplement, De l’usure, De la chasse, Du théâtre, etc., pour dire, Ouvrage, chapitre, article qui traite, où il est parlé de l’usure, de la chasse, du théâtre, etc. – On doit rapporter à cet alinéa les imprécations telles que Foin de moi ! La peste soit du maraud ! Etc.
Fam., On dirait d’un fou, etc. Voyez Dire.
De, régit également le mot ou les mots qui servent à déterminer, à préciser la signification d’un adjectif. Plein d’eau. Vide de sens. Bien fait de sa personne. Doux et humble de cœur. Perclus de tous ses membres. Large de six pieds. Plus grand de trois pouces. Âgé de trente ans. Digne d’envie, d’estime, de louange. Sûr de son fait. Responsable de quelque chose. Avide de gain. Jaloux des succès d’autrui.
Il sert quelquefois à déterminer d’une manière analogue les substantifs qui désignent une personne considérée par rapport à une certaine qualité. Possesseur de fait. Héritier de droit. Il n’était roi que de nom. Allemand d’origine. Français de cœur. Il est chirurgien de profession, de sa profession. C’est un menteur de profession. On dit à peu près de même, Possession, gouvernement, puissance de fait.
Souvent la préposition De a pour complément un verbe à l’infinitif, lorsqu’elle sert, comme dans les divers exemples qui précèdent, à déterminer les mots qui expriment une action, une qualité. On l’accusa d’avoir conspiré. Je vous charge de lui écrire. Faites-leur signe d’approcher. Tâchons de l’obtenir. S’efforcer de marcher. Il s’excusa d’y aller. Se repentir d’avoir trop parlé. Désespérer de réussir. S’ennuyer de lire. Il est incapable de mal faire. Je suis impatient de l’entendre.
De, se place de même entre certains verbes actifs et l’infinitif qui indique l’objet direct de l’action. On lui conseilla de partir. Négliger d’écrire. Se proposer de faire une chose. Dites-lui de venir. Je me rappelle bien de l’avoir vu. Avant que l’orateur eût commencé de parler. Il ne laissa pas de le faire. Il mérite d’être admis. Puis-je espérer de le voir ? Je désire de l’entendre. On dit également bien, J’espère de le voir, et J’espère le voir. On dit aussi, Je désire l’entendre. Voyez Espérer et Désirer.
Plusieurs verbes, tels que Commencer, continuer, etc., se construisent, devant l’infinitif, tantôt avec la préposition De, tantôt avec la préposition À. Voyez, pour la différence de sens qui en résulte, l’article de cette dernière préposition.
Quelquefois, lorsque le verbe qui précède la préposition De peut être aisément suppléé, on le retranche, afin de donner plus de rapidité et de vivacité à l’expression. Aussitôt les ennemis de s’enfuir et de jeter leurs armes (se hâtèrent de s’enfuir et de jeter leurs armes). Il s’éloigna tout honteux, et nous de rire (et nous commençâmes de rire). Ce genre d’ellipse est un gallicisme qui s’emploie surtout dans le langage familier.
L’emploi de la préposition De avec l’infinitif a lieu également dans beaucoup d’autres cas difficiles à préciser, et où bien souvent elle semble n’être qu’une particule destinée à lier le verbe avec ce qui le précède. Les exemples suivants pourront servir à en donner quelque idée. Il aima mieux périr que de se rendre. Plutôt mourir que d’être esclaves. Je mourrais plutôt que d’y consentir. C’était peu pour lui d’avoir obtenu cet avantage. C’est folie, c’est être fou que d’entreprendre cela. Vous êtes bien bon de le croire. Ce que c’est que d’être heureux ! C’est à vous que je dois de n’être pas plus maltraité. J’irai vous voir avant de partir. Il veut, avant que de partir, régler toutes ses affaires. Il est juste de le récompenser. Il convient d’agir promptement. Il importe de le savoir. Il suffira de vous dire que… C’est à vous qu’il appartient de l’interroger, de décider cela, ou elliptiquement, C’est à vous de l’interroger, de décider cela. Il entre dans ses vues de leur laisser ignorer cela. À quoi sert-il de dissimuler ? ou simplement, Que sert de dissimuler ? L’essentiel, le principal, le plus sûr, etc., est d’agir ainsi, de faire telle chose.
De, après les noms, s’emploie fréquemment pour marquer Appartenance, dépendance.
– 1° Avec un complément déterminé, c’est-à-dire, qui indique d’une manière précise telle personne ou telle chose : Le livre de Pierre. La maison de mon frère. La patrie, le nom, la condition, la profession d’une personne. La miséricorde de Dieu. Les actions de quelqu’un. C’est là le propre, le fait d’un ignorant. Elliptiq., Cela n’est pas d’un honnête homme (n’est pas le propre ou l’action d’un honnête homme). Le siècle de Louis XIV. Le roi de France. Les habitants de Paris. Les arbres des forêts. Les soldats d’une compagnie. Les animaux de telle classe. Un homme du peuple. Les gens de sa profession. Les hommes de l’art. La qualité, la nature, l’essence, la matière d’une chose. La force du lion. La beauté d’une femme. Les charmes de la vertu. Le sujet d’un discours. Le sens d’un mot. La largeur d’un fleuve. La couleur d’une étoffe. La dureté du fer. Le bruit du canon. La lumière du soleil. L’importance d’une affaire. L’agrément d’un séjour.
– 2° Avec un complément indéterminé, c’est-à-dire, qui n’indique la personne ou la chose que d’une manière vague et générale : Ménage de garçon. Bien de famille. La qualité d’ambassadeur. La profession d’avocat. Envie de femme grosse. Caprice d’enfant. Nom d’homme. Nid d’aigle. Poisson de rivière. Eau de fontaine. Voix de femme. Tableau de genre. Pièce de canon, d’artillerie. Excès de chaleur. Couleur d’or.
–  À cet emploi se rapportent plusieurs locutions particulières, telles que : Au lieu de. En vertu de. Afin de. À titre, en qualité de. À l’égard de. À propos de. À cause de. En conséquence, par suite de. En présence de. À côté de. Au travers de. Etc.
■ Nous allons présenter séparément chacun des rapports divers qui ont plus ou moins d’analogie avec celui d’Appartenance, de dépendance.
1° Rapport d’une chose à celui qui l’a faite, produite, etc. Les tragédies de Corneille. Les tableaux de Raphael.
2° Rapport d’une personne ou d’une chose au lieu d’origine ; d’une chose au lieu où elle a été faite, où elle s’est passée, p. 474etc. Denys d’Halicarnasse. Le vent du nord, du sud. Vent de nord, de sud. Du vin de Champagne. Un foulard des Indes. Le concile de Trente. La bataille d’Austerlitz.
3° Rapport au temps, à l’époque. Les institutions du moyen âge. Du vin de telle année. Les mœurs du temps. Les hommes d’à présent, d’aujourd’hui.
4° Rapport à la cause (presque toujours avec complément indéterminé). Pluie d’orage. Acte de dévouement. Trait de courage. Mouvement d’impatience. Cri de douleur. Accès de fièvre. Larmes de plaisir. Tour de faveur. Dans les phrases analogues où le complément est déterminé, on n’aperçoit ordinairement qu’un rapport de simple dépendance. Les actes d’un dévouement aveugle. Le cri de sa douleur.
5° Rapport à l’instrument (surtout avec complément indéterminé). Coup de bâton, de fusil, d’archet. Trait de plume. Signe de tête. Serrement de main.
6° Rapport d’une personne à une autre, établi par les liens du sang, par quelque alliance, par les sentiments, le devoir, les conventions, etc. Le père d’Alexandre. Le fils de mon ami. L’oncle, le cousin de ma femme. La femme, la veuve d’un tel. Le mari d’une telle. Les héritiers du défunt. Les disciples de Socrate. Les amis, les ennemis d’une personne. L’aide de camp d’un général. Le cuisinier d’un grand seigneur.
7° Rapport d’une chose à ce qu’elle concerne, à son objet, à sa fin, à son but. Le ministère de la justice. L’administration des postes. Une société d’assurance. Le commerce des grains. La jouissance d’un bien. Le droit de chasse. La composition d’un ouvrage. La nouvelle d’un événement. La défense d’un accusé, d’une doctrine. Vœu de chasteté. Traité de paix. Acte de vente. Certificat d’origine. Le souvenir d’un événement. Inspirer à quelqu’un l’horreur du vice, la haine des méchants, le mépris des richesses, l’amour du vrai, du juste, etc. L’action de manger, de boire, de marcher, etc. La faculté de se mouvoir. Le besoin de dormir. Le droit de parler. L’intention de partir. On doit rapporter à cet emploi les locutions telles que Le ministre de la justice, le directeur des postes, les assureurs d’un navire, le possesseur d’une chose, l’auteur d’un livre, d’un tableau, des rivaux de gloire, et leurs analogues.
8° Rapport particulier au sujet traité, à la chose expliquée, enseignée, etc. Traité de l’usure. Le titre des successions. Dictionnaire des rimes. Cours d’histoire, de droit. Leçons de dessin, de danse, etc. – On dit en des sens analogues : Professeur d’histoire. Maître de danse. Etc.
9° Rapport à la destination habituelle ou momentanée (surtout avec complément indéterminé). Salle de spectacle. Place d’armes. Cour de justice. Port de mer. Habit de cérémonie. Vêtement d’homme, de femme. Chien de chasse, d’arrêt. Pierre de touche. Valet de pied. Les hommes de garde, de service, de corvée, etc. C’est dans un sens analogue à celui du dernier exemple qu’on dit, Être de garde, de service, etc.
10° Rapport à la profession (presque toujours avec complément indéterminé). Un homme de cabinet, de lettres, de plume. Un homme de guerre, d’épée. Un homme de peine. Une femme de ménage.
11° Rapport à la condition (presque toujours avec complément indéterminé). Un homme de qualité, de condition. Un fils de famille. Une dame de haut parage, du haut parage. Un homme de basse extraction. Un homme de peu, de rien.
12° Rapport d’une personne ou d’une chose à ce qui la modifie et la distingue, à sa qualité, à sa nature, etc. Un homme de haute taille. Une personne de mauvaise mine. Un homme de génie, de courage, de bonne volonté. Un jeune homme d’une conduite réglée. Un enfant d’un bon naturel. Un vaisseau de haut bord. Une rivière de peu de largeur. Une chose de même grandeur, de la même grandeur qu’une autre. Affaire d’importance. Marchandises de bonne, de mauvaise qualité. Remède d’un effet sûr. Étoffe de durée. Robe de couleur. Fruit de forme ronde. Poudre de senteur. On peut rapporter à cet alinéa la phrase, Être de loisir, Avoir quelque loisir, n’avoir pour le présent aucune occupation.
13° Rapport particulier d’une personne ou d’une chose à ce qui constitue sa dimension, sa valeur, sa durée, sa force, etc. Un homme de cinq pieds trois pouces. Une pièce de vingt francs. Une dot de vingt mille écus. Une armée de cent mille hommes. Une maison de cinq étages. Un vers de dix syllabes. Une guerre de trente ans. Un enfant de six mois. Un froid de dix degrés.
14° Rapport du contenant au contenu. Une bouteille de vin. Une tasse de café. Un panier de fraises. Les locutions ainsi formées ne désignent très-souvent que le contenu. Boire une bouteille de vin. Etc.
15° Rapport de la partie au tout, à l’ensemble. – Avec complément déterminé : La main d’une personne. Le derrière de la tête. Le bout du doigt. La lame d’une épée. Le pied d’une montagne. Les colonnes d’un temple. Le commencement, la fin, le milieu, l’extrémité de quelque chose. – Avec complément indéterminé : Une lame d’épée. Une main de femme. Une branche d’arbre. Etc.
16° Rapport d’une chose à ce dont elle est formée, composée (toujours avec complément indéterminé). Une goutte d’eau. Une prise de tabac. Un morceau de pain. Une bouteille de vin. Une pièce de terre. Six pieds de terre. Une somme d’argent. Un escadron de hussards. Une paire de pistolets. Un couple de pigeons. Une classe d’animaux. Un faisceau de lances. Un recueil de poésies. Les adverbes de quantité forment avec la préposition De un grand nombre de locutions, qui toutes se rapportent à cet emploi. Beaucoup d’argent. Trop de richesses. Assez de pouvoir. Peu de bien. Plus de monde. Moins de ressources. Combien de soldats.
17° Rapport particulier d’une chose à la matière dont elle est faite. Une porte de bois. Un pont de pierre. Une barre de fer. Une tabatière d’or. Une table de marbre. Un habit de drap. Un lit de plume. Un balai de plumes. Un collier de perles. Une cotte de mailles. C’est un homme de chair et d’os comme vous et moi. On dit figurément : Un cœur de rocher. Un bras de fer.
18° Rapport d’une portion ou fraction à la totalité, souvent avec l’idée accessoire de retranchement ou d’extraction (et toujours avec complément déterminé). Le tiers, le quart, la moitié de la somme. Il perdit une partie de sa fortune, et dans la même analogie, la totalité de sa fortune. Une portion, une partie du territoire. Le reste du temps. Il fait partie de cette assemblée. Donnez-lui un morceau de ce pain. Prenez quelques gouttes de cet élixir. Cela n’a rien diminué de sa gloire. Quel est le plus habile de ces deux hommes ? ou (en considérant à part l’un de l’autre les termes comparés, et en redoublant la préposition), Quel est le plus habile, de cet homme-ci ou de celui-là ? Il envoya dix hommes de sa troupe. De deux choses l’une. De deux jours l’un. De tous les pays que j’ai parcourus, aucun ne m’a paru plus beau que la France. De six cents hommes qui montèrent à l’assaut, pas un n’est revenu. Plusieurs de ces personnes y étaient. Il fut un des premiers qui demandèrent cette réforme. L’un des plus célèbres philosophes de l’antiquité. C’est, de tous ces monuments, le seul qui soit resté debout. Dix de ces pièces de monnaie n’en valent qu’une de celles-là. On doit rapporter à ce paragraphe les locutions Rien du tout, Pas la moindre chose prise sur le tout ; et Point du tout, pas du tout, où les mots Point et pas expriment la plus petite quantité possible de quelque chose.
On sous-entend quelquefois le mot qui désigne la portion ou fraction, quand il peut être aisément suppléé. Prenez de cela. Donnez-lui de ceci. Mangez de cette soupe. Goûter d’un mets. J’ai bu de son vin. Elle a perdu de sa fraîcheur. Il recevra de mes nouvelles. Il fut des premiers à réclamer. Voilà de mes gens, qui veulent recevoir et ne point donner. Je ne suis pas de ces gens qui disent… Il est de telle assemblée, de tel parti. Je suis de vos amis. Êtes-vous des nôtres ? N’être plus de ce monde. Non, du tout. On dit à peu près de même, Être d’un repas, d’une noce, de noce, d’un bal, d’une fête, de fête, d’une partie, etc., Y assister, y prendre quelque part.
La préposition De n’est même très-souvent qu’un mot partitif, qu’une particule extractive désignant Une quantité vague, un nombre indéterminé. Prendre de la nourriture. Manger de la viande, de bonne viande. Boire du vin, de bon vin, du vin vieux. Voilà de bonne eau. J’ai de bon tabac. De l’eau bonne à boire. Des soldats braves. De braves soldats. Ce sont de bonnes gens. C’étaient de jeunes et jolies femmes. C’étaient de jeunes fous, des jeunes gens. Dire de bonnes plaisanteries. Dire des bons mots. Prendre des oiseaux. Donner de l’argent. Je veux du bon, du beau, du neuf, du solide, etc. Il y a des hommes ainsi faits. Il est des moments où… Si j’ai de l’argent, ce n’est pas pour le dépenser follement. Le pluriel Des a quelquefois le sens de Plusieurs. Il a été des années sans le voir. On y voit des milliers d’arbres.
Dans les phrases négatives, De partitif équivaut à peu près aux mots Nul, aucun, mais alors son complément ne reçoit jamais l’article. Je n’ai de volonté que la tienne. Je ne connais pas d’homme plus importun. Parler sans faire de fautes. Il n’a point tué d’ennemis. Ne pouvoir souffrir de rival, de rivaux. N’avez-vous point d’enfants ? N’avoir plus d’amis, de bien.
p. 475Quelquefois la phrase a un tour négatif et un sens positif. Dans ce cas, le mot qui sert de complément à la préposition doit toujours être précédé de l’article. Je n’ai pas de l’argent pour le dépenser follement. N’avez-vous pas de la santé, de la fortune, des amis ? que vous faut-il de plus ? Il ne peut parler sans faire des fautes.
De, précédant un adjectif, un participe passif, etc., peut ordinairement se résoudre par un pronom relatif suivi du verbe Être. Il y eut mille hommes de (qui furent) tués. Il y a dans ce qu’il dit quelque chose de (qui est) vrai. Y a-t-il quelqu’un d’assez (qui soit assez) ignorant pour… Je ne vois rien là de (qui soit) bien étonnant. A-t-on jamais ouï rien de (qui soit) pareil ? Sa conduite n’a rien de (qui soit) noble. Rien de (qui soit) plus simple que cela. Je ne vois rien de (qui soit) mieux. Sinon, rien de fait (qui soit fait, arrêté, conclu).
De, s’emploie d’une façon particulière pour distinguer les noms propres de nobles, ordinairement empruntés au lieu d’origine, à quelque particularité locale, à une terre, etc. Henri de la Tour d’Auvergne. Madame de Maintenon. Monsieur de Caylus. Dans la plupart de ces dénominations, il y a ellipse d’un titre de noblesse (Madame la marquise de Maintenon. Monsieur le comte de Caylus.)
Il se prend quelquefois substantivement, par allusion au sens qui précède. Mettre le de devant son nom. Cet emploi est familier.
De, sert quelquefois à unir le nom commun d’une chose avec le mot ou l’expression qui la distingue de toutes les autres choses semblables. La ville de Paris. Le fleuve du Rhône. Le mois de septembre. La comédie du Misanthrope. Le mot de gueux est familier. Le cri de Vive le roi !
Il se met encore, dans le discours familier, après un substantif, ou après un adjectif qui peut être employé substantivement, pour joindre ces mots avec le nom de la personne ou de la chose qu’ils qualifient. Ce diable d’homme. Quel chien de métier ! Un fripon d’enfant. Un drôle de corps. Une drôle d’affaire.
Il s’emploie dans certaines locations consacrées, pour exprimer L’excellence d’une chose sur toutes les autres choses de même nature. Ainsi on dit, dans le style de la Bible : Le saint des saints, Le lieu le plus saint du temple. Le Cantique des cantiques, Le cantique par excellence. Vanité des vanités, La plus grande des vanités. Dans le style élevé, L’Être des êtres, L’Être suprême. Etc.
De, entre aussi dans plusieurs locutions adverbiales, ou autres, qui indiquent Une certaine époque ou Une certaine durée. Nous partîmes de nuit, de jour. Je sortis de bonne heure. De grand matin. De présent (en termes de Pratique). Du vivant d’un tel. C’était bien autre chose de mon temps. De tout temps il en fut ainsi. Il ne viendra pas d’aujourd’hui. Il ne m’a pas quitté de tout le jour. Je ne le reverrai pas de huit jours. De ma vie je n’ai vu pareille chose. De mémoire d’homme.
Il sert également dans certaines locutions à marquer Conformité. Je suis de votre avis. Cela n’est pas de mon goût. Les cérémonies d’usage (usitées). Ce mot n’est d’usage qu’en telle phrase. Cela n’est plus de mode. Cela n’est pas de la bienséance (n’est pas bienséant). Cela n’est pas du jeu. Je sais ce qui est de mon devoir. Comme de raison. Comme de juste. De l’aveu de tout le monde. C’est de mon consentement qu’il a fait cela. Il est de fait que… On dit à peu près de même : Cela est de rigueur. Être de mise. Etc.
Pour toutes les autres locutions, telles que D’avance, d’abord, d’ailleurs, du moins, de suite, du reste, de plus belle, de nouveau, d’ordinaire, de grâce, de retour, etc., voyez les différents articles des mots qui accompagnent la préposition.
La particule relative En remplace, dans plusieurs cas, la préposition De et son régime. Voyez l’article de cette particule.
De, sert à former un grand nombre de composés, et modifie plus ou moins la signification du mot simple : Découler (couler de haut en bas). Dévier (s’écarter de la voie). Démontrer (montrer, faire voir complétement). Dénouer (défaire ce qui était noué). Etc. – Mais la particule qui entre dans la composition des mots n’est pas toujours la préposition De ; elle n’est souvent qu’une alteration des particules dis ou di, comme dans Départir, désunir, analogues à Disperser, dissoudre. Dans certains cas, on peut lui attribuer indifféremment l’une ou l’autre origine : Déjoindre, dépouiller, déterminer (en latin, Dejungere ou disjungere, despoliare ou dispoliare, determinare ou disterminare).
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