fortune

5e édition

FORTUNE.

s. f.
■  Cas fortuit, hasard. Bonne fortune. Mauvaise fortune. En cas de fortune. Je me rencontrai là par bonne fortune pour moi. Il donne tout à la fortune. Les accidens de la fortune. Il court fortune d’être quelque jour un grand Seigneur, d’être un jour fort riche. Il court fortune d’hériter de tous ces grands biens, d’épouser une grande héritière. Il a couru fortune d’être noyé. Il court fortune de la vie. J’en courrai la fortune. Tenter fortune. Éprouver un revers de fortune. Être à l’abri des revers de fortune.
Il se prend quelquefois pour Bonheur. Il est en fortune, il gagne tout ce qu’il veut.
Il se prend aussi pour Malheur, péril, danger, risque : Dieu vous préserve de mal et de fortune ; et dans cette phrase de Pratique, À ses risques, périls et fortune. En ce même sens on dit proverbialement, Contre fortune bon cœur.
On appelle Fortune de mer, Les fâcheux accidens qui arrivent à ceux qui naviguent sur mer, comme de faire naufrage, d’échouer, etc.
Fortune, se prend aussi pour Tout ce qui peut arriver de bien ou de mal à un homme. Courir la fortune de quelqu’un. Nous courons tous deux même fortune. Nous sommes compagnons de fortune. S’attacher à la fortune de quelqu’un, suivre sa fortune. Il est le maître et l’arbitre de ma fortune. Il a éprouvé l’une et l’autre fortune.
On dit familièrement, Courir la fortune du pot, pour dire, S’exposer à faire mauvaise chère en allant dîner dans une maison où l’on n’est point attendu.
Fortune, se prend aussi pour L’avancement et l’établissement dans les biens, dans les charges, dans les honneurs. Grande fortune. Belle fortune. Médiocre fortune. Sa fortune est digne d’envie. Faire fortune. Faire la fortune de quelqu’un. Établir, affermir sa fortune. Ruiner sa fortune. Perdre sa fortune par sa mauvaise conduite. Ménager bien sa fortune. Parvenir à une haute fortune. S’il vit, il portera, il poussera sa fortune bien loin. Vous êtes en bon chemin, poussez votre fortune. N’abusez pas de votre fortune. Sa fortune est encore chancelante. Il semble que sa fortune diminue, qu’elle baisse. Ses envieux tâchent de traverser, d’ébranler sa fortune. Tenir sa fortune de quelqu’un. Il doit sa fortune à un tel. Il ne doit sa fortune qu’à son propre mérite. On a vu des fortunes bien étonnantes depuis vingt ans. Les fortunes subites sont rarement durables. N’avoir point de fortune.
Il se prend aussi pour L’état, la condition où l’on est. Se contenter de sa fortune. Il s’est toujours tenu dans sa première fortune. Il n’a point changé sa fortune.
On appelle Biens de la fortune, Les richesses, les honneurs, les charges. Les biens de la fortune ne sont pas les vrais biens. Le sage ne recherche pas ardemment les biens de la fortune.
On appelle Homme de fortune, Un homme qui, d’un fort petit commencement, est parvenu à de grands biens ; et, Soldat de fortune, Un homme de guerre qui, sans naissance, et sans autre recommandation que son mérite, est parvenu des derniers rangs aux grades les plus élevés.
On appelle de même, Officier de fortune, Un soldat devenu Officier par son seul mérite.
On dit proverbialement et figurément, que Chacun est artisan de sa fortune, pour dire, que Généralement parlant, chacun peut se rendre heureux dans son état, que notre bonheur dépend de notre conduite.
Et on dit proverbialement, Brusquer fortune, pour dire, Chercher à faire fortune. On le dit aussi, pour dire, Chercher une bonne rencontre.
Bonne fortune, se dit en termes de Galanterie, pour signifier Les bonnes grâces d’une femme. Il est aimé p. 606des Femmes, il a eu beaucoup de bonnes fortunes. C’est un homme à bonnes fortunes. Aller en bonne fortune.
Fortune, selon les Païens, étoit une Déesse qui faisoit le bonheur et le malheur, tous les bons et les mauvais succès. Le Temple de la Fortune. La statue de la Fortune. Les Romains adoroient la Fortune, sacrifioient à la Fortune. Aujourd’hui que nous reconnoissons que la Fortune n’est rien par elle-même, on ne laisse pas néanmoins de se servir de la plupart des phrases dont les Anciens se servoient ; et alors elles sont figurées. Ainsi on dit : La Fortune est aveugle, inconstante, légère, variable, contraire, favorable, cruelle, bizarre, capricieuse, changeante, volage. Les caresses, les faveurs de la Fortune. L’inconstance, le caprice, la bizarrerie, les revers de la Fortune. Les révolutions de la Fortune. L’empire, la puissance de la Fortune. Il est maltraité de la Fortune. Il accuse la Fortune de son malheur. La Fortune lui rit. La Fortune lui en veut ; Ce qui se dit également en bonne et en mauvaise part. La Fortune lui a tourné le dos. La Fortune élève les uns, abaisse les autres. Se commettre, s’abandonner à la Fortune. La roue de la Fortune. La Fortune préside à la guerre, à la Cour, au jeu. La Cour est le théâtre de la Fortune. Cet homme de néant élevé si haut est un jeu de la Fortune, un ouvrage du caprice de la Fortune. Les hommes sont le jouet de la Fortune. La Fortune se joue de tout. La Fortune aime les jeunes gens.
On appelle Tous les grands changemens qui arrivent aux hommes ou aux États, et qui les élèvent ou les abaissent, Des jeux, des coups, des caprices de la Fortune.
On dit figurém. et proverb. Attacher un clou à la roue de la Fortune, pour dire, Trouver moyen de la fixer.
On dit, Adorer, encenser la Fortune, sacrifier à la Fortune, pour dire, S’attacher à ceux qui sont en faveur, en crédit.
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