retourner

RETOURNER

conjugaison verbe transitif, intransitif et pronominal
Étymologie : ixe siècle. Dérivé de tourner.

I.

I. Verbe transitif.
1.  Mettre une chose à l’envers, la tourner dans la position contraire à la précédente. Retourner le sablier. Retourner un matelas. Retourner du foin pour qu’il sèche. Retourner un miroir contre le mur. S’emparer d’une batterie pour en retourner les canons contre l’ennemi. Fig. Retourner le mouvement, la tendance.
▪ Spécialement. Marque de domaine : agriculture. Retourner la terre, la remuer profondément avec une bêche, une charrue, etc., pour la préparer à recevoir les semailles. Par métonymie. Retourner une plate-bande, un champ. – Marque de domaine : couture. Démonter tout ou partie d’un vêtement dont l’étoffe est usée sur l’endroit, puis procéder au remontage en faisant paraître l’envers à l’extérieur. Retourner un pardessus, le col d’une chemise. – Marque de domaine : peausserie. Travailler une peau de façon que les poils de la fourrure se trouvent à l’intérieur du vêtement. Surtout au participe passé. Un blouson en mouton retourné. – Marque de domaine : jeux de cartes. Changer une carte de face pour faire apparaître sa couleur, sa figure, etc. Retourner les cartes à la bataille. Belote retournée, qui se joue à deux avec la moitié des cartes découvertes. S’emploie en particulier, dans certains jeux, lorsqu’on découvre, après la distribution, la première carte du talon qui va déterminer la couleur de l’atout. Retourner une carte à trèfle ou, elliptiquement, retourner trèfle. Impers. Il retourne carreau. Cette construction ne s’emploie plus guère qu’intransitivement dans l’expression figurée et familière De quoi il retourne, ce dont il s’agit, ce qui se passe. Ignorer, savoir de quoi il retourne. – Marque de domaine : jeux de ballon. Au participe passé, adjectivement. Un coup de pied retourné ou, elliptiquement et subst., un retourné, tir par lequel un joueur renvoie le ballon derrière lui, en le faisant passer au-dessus de sa tête.
▪ Loc. et expr. Tout retourner dans une pièce, dans une maison ou, par métonymie et fam., retourner une pièce, une maison, la fouiller en mettant tout ce qu’elle contient sens dessus dessous pour trouver quelque chose. Retourner son arme contre soi, se donner la mort après avoir menacé ou tué d’autres personnes. Fig. et fam. Retourner les poches à quelqu’un, le voler. Retourner sa veste, changer d’opinion, de parti par opportunisme. Retourner le cœur, l’estomac à quelqu’un, susciter le dégoût chez lui.
▪ Par extension. Faire passer quelqu’un du dos sur le ventre ou inversement. Retourner un bébé dans son berceau. Le lutteur retourna son adversaire. Fig. Faire changer entièrement une personne d’avis, la faire passer d’un camp à l’autre. Cet agent étranger a été retourné par nos services. Retourner signifie aussi, familièrement, Bouleverser profondément, jeter dans le trouble, le désarroi. Ce film m’a retourné. Nous avons frôlé la catastrophe, j’en suis encore tout retourné.
▪ Expr. fig. et fam. Retourner quelqu’un comme une crêpe, comme un gant, l’influencer pour qu’il change radicalement d’opinion.
2.  Faire repartir une chose vers son point de départ, la renvoyer dans la direction inverse. Cette lettre a été retournée à l’expéditeur. Retourner des invendus. Un manuscrit retourné par l’éditeur. Retourner une balle de service au badminton.
▪ Par extension. Répondre par l’identique à un geste, à un propos, etc. Retourner un salut. Retourner une gifle.
▪ Loc. et expr. fig. Retourner une accusation, un argument, des déclarations contre quelqu’un, les diriger contre lui après qu’il les a lui-même utilisés. Retourner la politesse, le compliment à quelqu’un, avoir pour lui les mêmes égards ou, iron., user avec lui des mêmes mauvais procédés que ceux dont il vous a gratifié.
3.  Tourner une chose de nouveau, la mouvoir en divers sens (souvent employé en relation avec le verbe simple). Il tournait et retournait entre ses mains son chapeau sans oser parler. Tourner et retourner un document pour l’examiner. Retourner la salade, remuer les feuilles pour y mêler l’assaisonnement.
▪ Fig. Considérer longuement, examiner sous divers angles. Tourner et retourner une pensée. Il ne cesse de retourner des idées de vengeance. Retourner un problème dans tous les sens.
▪ Expr. fig. et fam. Retourner le poignard, le couteau, le fer dans la plaie, raviver une peine, une humiliation. Retourner quelqu’un sur le gril, le faire souffrir, le tourmenter longuement (on dit plutôt Tenir quelqu’un sur le gril).

II.

II. Verbe intransitif. Conjugaison : (se conjugue avec l’auxiliaire Être).
1.  Se rendre de nouveau en quelque lieu. Êtes-vous retourné en Italie ? Je ne leur ai pas rendu visite depuis longtemps, je serai content de retourner les voir.
2.  Repartir vers le lieu d’où l’on est venu et, notamment, regagner l’endroit où l’on réside ordinairement ; revenir. Il est retourné dans son pays, en province. Retourner chez soi. Retournez à votre place. Retourner de, suivi d’un substantif (vieilli), rentrer de. Retourner de la guerre.
▪ Loc. Retourner sur ses pas, faire en sens inverse le chemin qu’on vient de parcourir (on dit aussi Revenir sur ses pas). Retourner en arrière, voir Arrière I.
▪ Spécialement. Marque de domaine : religion. Retourner à Dieu, retrouver la foi, la piété (en ce sens, on dit plutôt Revenir à Dieu) ; être rappelé à Dieu, mourir.
3.  Retrouver un état antérieur. Ce chat est retourné à l’état sauvage. Un jardin qui retourne à l’état de friche. Retourner au néant.
▪  Par extension. Reprendre une activité qu’on avait abandonnée. Après le déjeuner, il est retourné à son travail. Retourner à ses études. Il s’est remis au latin, il retourne à ses premières amours. Loc. fam. Y retourner, reprendre ce que l’on faisait et, fig., renouveler une expérience fâcheuse, retomber dans la même erreur. C’est plus fort que lui, il faut qu’il y retourne.

III.

III. Verbe pronominal.
1.  Tourner son corps ou une partie de son corps dans une direction inverse ou différente de celle qu’on avait ; faire un demi-tour pour regarder derrière soi. Il se retourne sans cesse dans son lit. Se retourner vers son voisin. Orphée aurait pu ramener Eurydice des enfers s’il ne s’était pas retourné. Se retourner sur une passante.
▪ Loc. et expr. Partir sans se retourner, quitter quelqu’un sans lui jeter un dernier regard et, fig., l’abandonner sans montrer de regret. Il doit se retourner dans sa tombe (fam.), se dit d’un défunt dont on imagine qu’il serait profondément indigné par quelque situation ou parole. Se retourner sur sa vie, sur son passé, les considérer avec du recul.
▪ Fig. Faire appel à quelqu’un, à quelque chose, notamment après avoir tout tenté. Ne pouvant s’entendre à l’amiable, ils se sont retournés vers un homme de loi. Désabusé du monde, il se retourna vers la religion.
▪ Sans complément. Fam. S’adapter à une situation imprévue, prendre des dispositions pour faire face à des circonstances nouvelles. Ses affaires traversaient une crise, mais il a su se retourner. Laissez-lui le temps de se retourner.
2.  Suivi de la préposition contre. Devenir contraire à quelqu’un après lui avoir été favorable. Il fut notre allié avant de se retourner contre nous. Par extension. Ses calomnies se sont retournées contre lui. Tous leurs arguments peuvent se retourner contre eux.
▪ Spécialement. Intenter une action en justice contre une personne physique ou morale qu’on estime responsable d’un acte dont on a été victime. La compagnie d’assurances s’est retournée contre l’auteur de l’accident. Il s’est retourné contre l’entreprise.
3.  En parlant d’un objet. Se placer sens dessus dessous. Le voilier s’est retourné. La voiture se retourna après avoir quitté la route. Le parapluie s’est retourné sous l’effet de la bourrasque. Fig. Les marchés se retournent.
4.  S’en retourner, repartir vers l’endroit d’où l’on est venu. Retournez-vous-en, retourne-t’en vite. Expr. fig. S’en retourner comme on est venu, sans avoir rien obtenu. Vieilli. S’en retourner avec sa courte honte, essuyer un affront.
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