bon, bonne

5e édition

[I.] BON, BONNE.

adject.
↪ voir aussi : [II.] Bon (n. m.)
■  Qui a de la bonté. Dieu est souverainement bon.
Il signifie aussi, Qui a en soi toutes les qualités convenables à sa nature, à sa destination, à l’emploi qui s’en doit faire. Dieu vit que la lumière étoit bonne.
Il se dit Des ouvrages de la nature, des ouvrages de l’art, et des qualités dé l’esprit. De bon vin. De bonne eau. De bon blé. De bonne avoine. Un bon air. Une bonne terre. Un bon pays. De bon fruit. De bonnes pêches. Un bon cheval. De bon or. De bon argent. Un bon Poëme. Un bon Livre. Il n’y a rien de bon dans cet ouvrage. Il y a du bon dans ce Livre. C’est un homme qui a de bonnes qualités.
Dans ce sens, on dit même Des choses nuisibles, qu’Elles sont bonnes. Du bon arsenic, du bon sublimé corrosif, de bonne ciguë ; et c’est pour dire, Propres à faire leur effet.
Bon, se dit aussi Des personnes qui excellent en quelque chose, en quelque profession. Bon Citoyen. Bon Marcheur. Bon Capitaine. Bon soldat. Bon homme de guerre. Bon Général. Bon homme de cheval. Bon homme de mer. Bon ouvrier. Bon Médecin. Bon Philosophe. Bon Poëte. Bon Avocat. Bon p. 151Prédicateur. Bon Orateur. Bon Grammairien.
On dit d’Un homme qui écrit bien, qui peint bien, qu’Il a une bonne main ; qu’Une nouvelle vient de bonne main, pour dire, qu’Elle vient de bonne part ; qu’Une affaire est en bonnes mains, pour dire, qu’Elle est entre les mains d’une personne qui saura bien la conduire ; et qu’Un homme est en bonne main ; pour dire, que La personne qui en est chargée en aura bien soin, ou bien qu’il est sous l’autorité d’une personne qui lui fera bien faire son devoir. Il n’a qu’à se bien tenir, il est en bonne main. L’éducation de ce jeune homme est en bonnes mains.
Bon, signifie aussi Clément, miséricordieux : et c’est dans ce sens qu’on dit, que Dieu est bon, que Dieu est tout bon ; et qu’on se sert de ces façons de parler : Aimer le bon Dieu. Prier le bon Dieu. S’il plaît au bon Dieu.
On dit par exclamation, Bon Dieu ! pour marquer La surprise où l’on est de quelque chose. Bon Dieu, l’auroit-on jamais pu croire !
On dit aussi Bon ! pour exprimer L’étonnement, le doute ou l’incrédulité.
Tout-de-bon. Phrase adverbiale, interrogative quelquefois avec ironie, et affirmative de la part de celui qui répond. Tout-de-bon ? Oui, tout-de-bon.
Bon, en parlant Des personnes, signifie Indulgent, humain, facile et commode à vivre. Il faut être bien bon pour souffrir cela. C’est un très-bon homme. C’est une très-bonne femme. Un homme d’un bon commerce. Ce sont de bonnes gens.
On dit d’Un homme simple et de peu d’esprit, que C’est un bon Israélite ; et d’Un homme aisé à vivre, et qui ne prend pas garde de si près à la plupart des choses, on dit proverbialement et familièrement, que C’est un bon Prince. Il est bon Prince.
On dit dans le discours familier, Bon homme, bonne femme et bonnes gens, pour signifier Un homme et une femme qui sont déjà dans un âge avancé. Le bon homme se porte encore bien. La bonne femme n’en peut plus. Les bonnes gens commencent à baisser. On dit encore, Ce sont de bonnes gens, en parlant d’Une famille, d’une société composée de personnes qui ont de la bonté et de la simplicité. Ces bonnes gens nous ont offert tout ce qu’ils avoient, et n’ont rien voulu recevoir.
On se sert aussi du mot Bon homme, en deux sens fort différens, l’un de critique, l’autre d’éloge ; c’est le ton qui décide du sens. On dit d’Un homme simple, peu avisé, qui se laisse dominer et tromper par les autres, que C’est un bon homme : et l’on dit, avec éloge, d’Un homme d’esprit, plein de droiture, de candeur, d’affection, que C’est un homme de mérite, et un très-bon homme. C’est un si bon homme ! La première qualité dans la société est d’être bon homme. Il faut être bon homme avant tout.
Bon, signifie aussi, Propre à certains usages. C’est un homme bon à mille choses. C’est un homme qui est bon à tout. Bon à employer, bon pour le conseil, bon à avoir auprès de soi. Un remède bon au mal de tête. Cela est bon à la fièvre, contre la fièvre. Une viande bonne à manger. Du vin bon à boire. À quoi cela est-il bon ? Cela n’est pas bon à rien.
On dit proverbialement d’Un homme qui n’est propre à rien, qu’Il n’est bon ni à rôtir, ni à bouillir. On dit d’Un méchant homme, qu’Il n’est bon qu’à noyer. Et lorsqu’on veut faire entendre que ce qui a été bien reçu venant de quelqu’un, auroit été très-mal reçu venant d’un autre, on dit, Si un autre avoit dit, avoit fait cela, il ne seroit pas bon à jeter aux chiens.
On dit d’Un homme, qu’Il est bien bon de prétendre, de dire, de faire, etc. qu’On le trouve bon de dire, de faire, de prétendre, etc. pour dire, qu’Il n’est pas bien fondé, qu’il n’a nulle raison de prétendre, de dire, de faire, etc. Et on dit, qu’Il est bien bon de croire une chose, de la permettre, etc. pour dire, qu’Il est trop crédule, trop facile, etc.
Dans le style familier, en parlant d’Un homme qui a réjoui la compagnie par les choses qu’il a dites, on dit, Il a été bon aujourd’hui. Et en parlant d’un mot, d’Un conte qui cause quelque surprise agréable à ceux qui l’entendent, on dit, Il est bon-là. Il se dit aussi ironiquement.
Bon, en parlant Des choses, signifie Avantageux, favorable, utile, convenable. Cela ne présage rien de bon. Voilà un bon temps pour les voyageurs. Le temps est bon pour semer, pour planter. Voici la bonne heure pour lui parler,
On dit, Prendre quelque chose en bonne part, pour dire, Y donner un sens favorable lorsqu’on pourroit y en donner un autre, ne s’en point fâcher.
Proverbialement, lorsqu’un créancier ne se contente pas des excuses dont on le veut payer, il dit, Tout cela est bel et bon, mais de l’argent vaut mieux. La même chose se dit à ceux qui en veulent amuser d’autres par de belles promesses, par de vaines espérances.
On dit aussi proverbialement, Ce qui est bon à prendre, est bon à rendre. Mais cela ne se dit guère que par celui qui ayant trouvé quelque chose, le prend, et compte que le pis qui puisse arriver, c’est de le rendre. Et on dit, À quelque chose malheur est bon, pour dire, que Quelquefois un malheur qui arrive est l’occasion d’un bien.
On dit proverbialement, qu’Il fait bon en un endroit, pour dire, qu’On y est agréablement et à son aise. Et en parlant d’Un temps propre et commode pour parler à un homme, on dit, qu’Il y fait bon : comme au contraire, en parlant d’Un homme austère, difficile, fâcheux ou dangereux, on dit, qu’Il n’y fait pas bon.
On dit aussi proverbialem. Il fait bon vivre et ne rien savoir, on apprend toujours ; et, Il fait bon battre glorieux, il ne s’en vante pas.
On dit proverbialement, Bon cela, pour, Approuver une chose, après en avoir désapprouvé une autre ; et Bon, pour signifier qu’On acquiesce à une proposition, ou simplement qu’on a entendu.
Au Jeu, on dit, Faire bon, pour dire, Répondre qu’on paiera ce que l’on pourra perdre au-delà de ce qu’on a au jeu. Faire bon partout. Faire bon de tant. Et on dit en termes de Finances, Faire les deniers bons, pour dire, Se rendre garant du paiement de la somme dont il est question.
Bon, est aussi employé absolum, et solitairement en diverses autres phrases. Ainsi on dit, Trouver bon, pour dire, Approuver, permettre, avoir agréable ; Trouver tout bon, pour dire, S’accommoder presque également de tout ; Tenir bon, pour dire, Résister avec fermeté ; Sentir bon, pour dire, Avoir une odeur agréable ; et, Coûter bon, coûter bonne, pour dire, Coûter extrêmement cher.
Bon, joint avec les mots de Génie et Démon, signifie, Bienfaisant, favorable. Ainsi on dit, C’est son bon Génie qui l’a inspiré, qui l’a conduit. Et on appelle Bon Ange, l’Ange Gardien. Se recommander à son bon Ange.
On dit par caresse à quelqu’un dont on désire les conseils, Vous serez mon bon Ange, Vous me préserverez de chute.
On dit familièrement d’Un homme gai, de bon caractère, qui ne se fâche pas, C’est un bon diable. Il est sans esprit, assez bon diable du reste.
Bon, en parlant d’Un homme, se joint avec certains substantifs, avec lesquels il ne signifie autre chose qu’Un homme de bonne humeur et commode à vivre. C’est un bon compagnon, un bon vivant, un bon enfant, un bon garçon, un bon drôle. On dit d’Un homme fin et rusé, que C’est un bon Apôtre. Et dans le style familier, soit par injure, soit par plaisanterie, on dit, C’est un bon coquin, un bon fripon, un bon débauché, un bon vaurien, une bonne âme, une bonne pièce, une bonne bête, un bon bec ; et par exclamation, La bonne pièce ! la bonne âme ! la bonne bête !
On dit, qu’Un homme a le corps bon, et que C’est un bon corps d’homme, pour dire, qu’Il est sain, robuste, vigoureux ; qu’Il a bon pied, pour dire, qu’Il marche bien, qu’il va bien du pied ; qu’Il a bon pied, bon œil, pour dire, qu’Il est agile, alerte, éveillé ; ce qui signifie aussi figurément qu’Il est actif, vigilant sur tout ce qui l’intéresse ; et qu’Il a encore le cœur bon, pour dire, qu’Il a encore de la force.
On dit, qu’Un homme est de bonne maison, pour dire, qu’Il est d’une ancienne Noblesse. Et lorsqu’un homme qui a famille mène une vie rangée, économe, on dit, qu’Il fera bonne maison.
On dit d’Un homme franc et sincère, que C’est un bon Gaulois ; et d’Un homme franc et sans finesse, qu’Il y va de bonne foi, qu’il y va tout à la bonne foi.
Bon, en parlant des choses, signifie quelquefois Grand, et sert à donner plus d’énergie et de force aux substantifs avec lesquels il se joint. Il y a une bonne lieue d’ici-là. Il y a une bonne journée d’ici. Boire un bon verre de vin. p. 152Vous avez une bonne traite à faire. Il y a une bonne heure que je vous attends. Je vous dis une bonne fois pour toutes. Donner un bon soufflet, un bon coup d’épée. Avoir une bonne fièvre.
Bon, se joint aux mots de temps, de jour, d’heure, d’an et d’année, avec des significations assez différentes l’une de l’autre. Ainsi on dit, Avoir bon temps, se donner du bon temps, prendre du bon temps, pour dire, Se divertir. Et en termes de civilité. Donner le bonjour à quelqu’un, lui souhaiter le bonjour, lui souhaiter la bonne année. Et dans le style familier, Bon jour et bon an.
Bonne Année, se dit aussi pour dire Une année fertile et abondante. Et on dit proverbialement, Bon an, mal an, pour dire, Le produit d’une année compensant celle de l’autre. Sa Terre vaut dix mille livres de rente bon an mal an.
Bon Jour, se dit aussi pour signifier Un jour de Fête. C’est aujourd’hui un bon jour. Et lorsqu’on parle d’une méchante action faite en un jour solennel, on dit proverbialement et ironiquement, Bon jour, bonne œuvre.
On dit populairement, Faire son bon jour, pour dire, Communier, recevoir le Sacrement de l’Eucharistie.
On dit aussi, Les bonnes Fêtes, pour dire, Les grandes Fêtes. Il ne va au Sermon que les bonnes Fêtes.
Bonne Heure, outre la signification dont on a déjà parlé, se dit dans diverses autres acceptions. Ainsi on dit, De bonne heure, pour dire, Tôt. Tâchez de venir de bonne heure. Il est encore de bonne heure, pour dire, À temps, à propos. Vous venez à la bonne heure. On dit aussi, À la bonne heure, pour marquer une espèce d’approbation de quelque chose. On le dit aussi pour exprimer l’indifférence. Il me menace ! à la bonne heure, Passe, je m’en inquiète peu.
On dit, Bon visage d’Hôte, en parlant d’Un homme qui fait bien les honneurs de chez lui ; Faire bon visage à quelqu’un, lui faire bon accueil, lui faire bonne mine, pour dire, Lui faire un accueil agréable, le recevoir civilement ; Faire quelque chose, donner quelque chose de bonne grâce, pour dire, D’une manière gracieuse et honnête ; et, Avoir bonne grâce à faire quelque chose, pour dire, S’en bien acquitter. Il danse de bonne grâce. On dit aussi d’Un homme qui dit ou qui fait quelque chose mal-à-propos, et qu’il ne devroit pas faire, qu’Il n’a pas bonne grâce d’en user de la sorte.
On dit qu’Une chose fait bonne bouche, pour dire, qu’Elle laisse un goût agréable à la bouche ; et figurément, Garder une chose pour la bonne bouche, pour dire, La réserver pour la dernière comme la plus agréable ; et d’Un homme qui après avoir fait plusieurs pièces à quelqu’un, lui en fait une dernière plus sanglante que les autres, on dit, qu’Il la lui gardoit pour la bonne bouche.
On dit, Rester sur la bonne bouche, pour, S’arrêter après quelque chose d’agréable, sans risquer le retour. Il a gagné cent louis au jeu, et il s’est retiré, afin de rester sur la bonne bouche.
Bonne, est aussi employé sans aucun substantif précédent dans les phrases suivantes : La bailler bonne à quelqu’un, pour dire, Lui faire quelque pièce ; et, La lui garder bonne, pour dire, Conserver du ressentiment avec dessein de se venger dans l’occasion. Ces phrases sont du style familier.
On dit, Jouer bon jeu, bon argent, pour dire, Jouer sérieusement, et avec obligation de payer ; et figurém. Y aller bon jeu, bon argent, pour dire, En user sans ménagement, comme deux personnes qui se battent, qui plaident, qui disputent. Ils vont bon jeu, bon argent. Recevoir de l’argent à compte, pour dire, À déduire sur ce qui est dû. Et, À tout bon compte revenir, pour dire, Sans préjudice des erreurs de calcul. On dit aussi, qu’Un homme est un homme de bon compte, pour dire, qu’Il est fidèle dans les comptes qu’il rend. Et, Rendre bon compte de sa conduite, pour dire, Faire connoître qu’on a tenu une conduite à laquelle il n’y a rien à reprendre.
On dit, Donner de bonnes enseignes de quelque chose, pour dire, L’indiquer par des marques faciles à reconnoître. Et adverbialement, À bonnes enseignes, pour dire, Avec une connoissance suffisante de ce qui est à faire, avec sûreté. Il ne veut payer qu’à bonnes enseignes. Je n’y veux aller qu’à bonnes enseignes.
On dit qu’Un cheval galope sur le bon pied, pour dire, qu’En galopant, il lève le pied droit le premier. Et figurément on dit, Mettre quelqu’un sur le bon pied, pour dire, Le réduire à faire ce qu’il doit, à faire ce qu’on exige. Il faisoit le suffisant, mais je l’ai mis sur le bon pied. Et on dit aussi d’Un homme qui a de la réputation, du crédit, qu’Il est sur un bon pied dans le monde.
On dit proverbialement, Après bon vin, bon cheval, pour dire, que Quand on a un peu bu, on fait aller son cheval meilleur train.
On dit familièrement en parlant de vin, Tirer du bon, donner du bon ; et proverbialement, Qui bon l’achète, bon le boit. Et cela ne se dit pas seulement du vin, mais figurément de toute autre marchandise, pour dire, qu’Il n’y faut pas plaindre l’argent, et que quand on l’achète bonne, on s’en trouve bien.
On dit aussi proverbialement et figurément, À bon vin il ne faut point d’enseigne. Et il se dit généralement, pour marquer qu’Une chose qui est bonne, n’a pas besoin d’être annoncée par affiche.
On dit aussi proverbialement, À bon chat bon rat, pour dire, Bien attaqué, bien défendu ; et, À bon entendeur salut, Quand on veut faire entendre quelque chose à quelqu’un, en ne s’expliquant qu’à demi. Un tel a dit telle et telle chose, à bon entendeur salut.
Bon, se prend quelquefois substantivement, et signifie, Bonne qualité, ce qu’il y a de bon dans la personne ou dans la chose dont il s’agit. C’est un homme qui a du bon et du mauvais. Un fils qui n’a pris de son père que le bon. La pièce dont vous parlez a des défauts, mais il ne laisse pas d’y avoir du bon. Faire un extrait d’un Livre, et en tirer tout le bon, en prendre tout le bon.
Il signifie aussi Ce qu’il y a d’avantageux, d’important, de principal en quelque chose. Le bon de l’affaire est que.... On dit, Le bon de l’histoire, le bon du conte, pour dire, Ce qu’il y a de plaisant dans le récit qu’on fait d’un conte, d’une historiette.
On dit que Des gens d’affaire ont eu du bon dans un parti, dans un traité, pour dire, qu’Ils y ont trouvé du gain, du profit. Et en parlant d’une affaire d’argent, d’une entreprise lucrative, on appelle Le revenant bon, Ce qui en revient de profit. Ils ont eu tant de revenant bon dans ce traité, dans cette affaire. On appelle aussi Deniers revenans bons, La somme qui reste d’un fonds qu’on avoit destiné pour quelque dépense.
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