échapper

6e édition

ÉCHAPPER.

v. n.
■  S’évader, s’esquiver, se sauver des mains de quelqu’un, d’une prison, de quelque péril, etc. Laisser échapper un prisonnier. Tous ses compagnons furent massacrés, et lui-même n’échappa qu’à grand’ peine. Il s’emploie ordinairement avec la préposition de, quand il signifie, Cesser d’être où l’on était, sortir de, etc. Échapper des mains des ennemis. Échapper du naufrage, du feu. Échapper d’un danger. Il s’emploie au contraire avec la préposition à, quand il signifie, Se soustraire, se dérober à, être préservé de. Échapper à la fureur, à la poursuite des ennemis. Il ne peut m’échapper. Échapper à la tempête. Échapper au danger. Échapper à la mort.
Il s’emploie aussi figurément, surtout avec la préposition à. Il ne put échapper au dilemme pressant de son adversaire.
Il signifie plus particulièrement, tant au sens physique qu’au sens moral, N’être pas saisi, aperçu, découvert, ou seulement remarqué ; et alors il se conjugue toujours avec l’auxiliaire Avoir. Des étoiles si éloignées, des insectes si petits, échappent à la vue, aux yeux. La cause de ce phénomène échappe à toutes les recherches. Bien des choses échappent à notre attention. Rien n’échappe à sa pénétration. Le véritable sens avait échappé à tous les traducteurs. Votre observation m’avait d’abord échappé. Il a dit une sottise qui n’a point échappé à ses auditeurs.
Il se dit encore, figurément, Des choses dont on est frustré, ou que l’on ne saurait conserver, fixer, qui se perdent, s’évanouissent, se dissipent. Cet emploi, cet héritage lui échappe au moment où il croyait le tenir. Laisser échapper une place. Laisser échapper l’occasion, une bonne occasion. Cet avantage pourrait bien lui échapper. Son autorité lui échappe. La vie, le temps nous échappe. Ce dernier espoir allait aussi lui échapper.
La patience lui échappe, lui a échappé, Il commence à perdre patience, il a témoigné de l’impatience ; ou Il s’emporte, il s’est emporté, après s’être longtemps contenu.
Échapper de la mémoire, se dit Des choses dont on perd le souvenir, que l’on oublie. Cela m’avait, m’était échappé de la mémoire.
Échapper de la main, des mains, se dit Des choses qu’on laisse aller ou tomber involontairement. Sa canne lui échappa des mains, lui a échappé, lui est échappée des mains. On dit dans un sens analogue, Laisser échapper ce que l’on tient.
Laisser échapper un cri, un soupir, etc., Pousser un cri, un soupir, etc. Dans un sens analogue, Un cri, un soupir, etc., lui échappa, lui a échappé, lui est échappé, vint à lui échapper. Cela se dit surtout quand les actions dont il s’agit sont involontaires, et qu’on a fait quelque effort pour s’en abstenir.
Échapper, s’applique particulièrement À ce qu’on dit, à ce qu’on fait par imprudence, par indiscrétion, par mégarde, par négligence, etc. ; et alors il se conjugue toujours avec l’auxiliaire Être. À peine cette parole me fut-elle échappée, que je sentis mon imprudence. Son secret lui échappa. Il est impossible qu’une pareille bévue lui soit échappée. Quelques fautes, quelques négligences vous sont échappées par-ci par-là. On dit dans un sens analogue, Laisser échapper un mot, un secret, une bévue, des fautes, etc.
Il s’emploie souvent dans le même sens comme verbe impersonnel. Il lui est échappé un mot inconvenant. Il m’est échappé, il lui est échappé de dire, de faire, etc. Il lui échappe souvent de dire des choses déplacées. Il lui est échappé des fautes, des négligences.
Échapper, est quelquefois verbe actif, et signifie alors, Éviter. Échapper le danger. Échapper la potence. Il ne l’échappera pas. Échapper la côte.
Prov., L’échapper belle, Éviter heureusement un péril dont on était menacé. Il l’a échappé belle.
Échapper, avec le pronom personnel, signifie, S’évader, s’enfuir, s’esquiver ; et alors il ne peut jamais être suivi que de la préposition de. S’échapper de prison, des mains de quelqu’un. S’échapper à toutes jambes. L’oiseau que j’avais pris s’est échappé. L’animal rompit son lien et s’échappa.
Il signifie aussi, figurément, S’emporter inconsidérément à dire ou à faire quelque chose contre la raison ou la bienséance. Il est sujet à s’échapper. Il s’échappe souvent. Il s’est échappé jusqu’à injurier ce vieillard.
Il se dit encore, par extension, D’une chose qui d’elle-même sort d’un lieu, d’un endroit, d’une autre chose où elle était retenue, enfermée, contenue. L’eau s’échappe par une fente du rocher. La fumée ne s’échappait que par une étroite ouverture. Des pleurs s’échappèrent de mes yeux. Des sanglots s’échappaient de ma poitrine. Le glaive s’échappa de mes mains, Échappa de mes mains.
Il se dit quelquefois figurément, au sens moral, pour Se dissiper, s’évanouir. Elle vit s’échapper le dernier espoir qui lui restait.
Échappé, ée. participe.
Fig. et fam., C’est un cheval échappé, se dit D’un jeune homme vif, emporté, qui se soustrait à l’obéissance, à la discipline.
Échappé, s’emploie quelquefois substantivement, comme dans les phrases suivantes :
Fig. et fam., Un échappé des Petites-Maisons, Un fou. Un échappé des galères, Un homme qui a été aux galères, ou qui les a méritées. Un échappé de prison, Un homme qui sort de prison, ou qui est si mal vêtu, qu’il semble s’être échappé de prison.
Un échappé de barbe, Un cheval engendré d’un barbe et d’une cavale du pays.
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